Le narcissisme présidentiel est complexe, et, en ces jours maigres de 36%, sans doute pas en très bon état. Mais c'est dans ces conditions que le narcissisme blessé se rebiffe pour produire les symptômes les plus intéressants, comme le récent dérapage au Salon de l'Agriculture.
Peu à peu, il devient clair que le narcissisme présidentiel existe dans deux phases, liées toutes deux aux pouvoirs de séduction du Très Grand Homme (TGH). D'un côté, c'est l'homme fort, l'homme aux Ray-Bans, le type avec qui il vaut mieux être parce qu'il va très bientôt faire des Grandes Choses, celui qui connaît les méga-patrons, le Jet-Setteur Bling-Bling. Il peut être aussi, sans véritablement changer de registre, le super-flic, le dur-à-cuire qui va mettre tous les méchants en tôle. De l'autre, c'est le petit (et je précise -- afin d'éviter toute confusion pouvant me conduire devant les tribunaux -- que j'entends "petit" dans cette phrase au sens le plus digne et glorieux imaginable) garçon qui attire notre sympathie en montrant que les autres, les grands méchants, lui tape dessus.
Dans les deux cas, le narcissisme était finalement sauf, car même pour le TGH-victime, il demande aux autres, à son public ou à son interlocuteur, de restituer l'image menacée, ou du moins de participer au pathos de la blessure narcissique.
Jusqu'à son élection, ce double système marchait à merveille. Quand les choses allaient bien, même au prix de quelques bidouillages statistiques, le TGH-flambeur pouvait rouler des mécaniques en jeune ministre dynamqieu et efficace. Et quand les choses allaient mal, il pouvait se dédouaner en faisant porter le chapeau aux plus puissants, et se montrer à nouveau dans le rôle de la victime.
Depuis le 6 mai, Sarkozy a trop joué sur la corde de son omni-désirabilité. A 36%, il cherche à joué sur l'autre corde, celle de la petite victime. Mais quand on est Président de la R., c'est un peu moins facile de jouer l'impuissant. On envoie des troupes comme Jego et Karoutchi brailler sur le "lynchage" dont il serait l'objet, mais ça ne prend pas. Victime des vieux qui vont au Salon de l'Agriculture ? Moyennement convaincant, tout de même.
Et puis, depuis hier, ils ont trouvé! Grâce au Conseil Constitutionnel, Sarkozy peut à nouveau être victime, car il a trouvé plus fort que lui : la Constitution elle-même. Maintenant il peut demander l'aide et le soutien de tous les téléspectateurs dans sa lutte contre cet ignoble document!
Bien joué.
Très fort !
RépondreSupprimerEt moi qui croyais que c'était en vertu de cette constitution que le sieur fut élu...
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