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13 mars 2008

Lire le MoDem, élire le PS

Je ne suis pas contre l'existence du MoDem. A la différence de l'UDF traditionelle, le MoDem est malgré tout beaucoup plus critique vis-à-vis de l'UMP et de la droite en général, et de ce point de vue, au moins, le MoDem présente quelques avantages. Le problème du MoDem, cependant, c'est son ambiguïté.

Dans un de ces billets d'une clairevoyance directe dont il garde précieusement le secret et qui lui a valu d'être cité, encore, par notre cher quotidien véspéral (en même temps qu'un autre illustre confrère), Nicolas J. écrit :

La stratégie du Modem permet juste de faire perdre toute lisibilité à la politique Française.

François Bayrou a eu beau jeu de dénoncer, depuis belle lurette maintenant, les effets néfastes du jeu des partis. On voit bien aujourd'hui que son mouvement dépend en fait de ce jeu. Comment sinon un parti faisant un score aussi faible pourrait-il devenir l'objet de toutes les convoitises ? Le rôle d'arbitre du MoDem n'est pas la conséquence de sa force politique, mais de son positionnement. On sait que le LCR ou le PCF ne vont pas s'allier à l'UMP ; au pire leurs voix disparaissent au second tour. Grâce à leur position centrale, les voix du MoDem, si elles étaient véritablement disciplinées, comptent double selon les alliances : tant de voix en moins pour les uns, autant en plus pour les autres. Difficile de dire, dans ces conditions, que le bipartisme ne profite pas à François Bayrou.

Et voilà l'autre gros inconvénient du MoDem, qui, il me semble, pèse plus lourd pour le PS que pour l'UMP : grâce à l'ambiguïté savamment entretenue, le MoDem peut paraître à gauche sans être à gauche, attirer les décus du PS finalement pour neutraliser leurs voix. Julien Tolédano a raison de dire que la plupart des nouvelles recrus du MoDem ne sont sans doute pas pleinement consciencts de la dimension démocrate-chretien de leur parti. Lors de l'élection présidentielle, je n'avais pas compris comment Bayrou pouvait promettre des réductions budgétaires très importantes sans avoir à répondre des effets (énormes) des coupes qui aurait été nécessaires. Mais encore une fois, ce rôle de réceptacle des déçus des autres partis, c'est le produit du bipartisme. Le MoDem n'a pas besoin d'avoir une ligne politique claire car il profite de sa place dans le système.

La démonstration de ce que je viens de dire va peut-être se produire à Toulouse, où l'accord MoDem-UMP semble avoir débouché aussitôt sur des excellentes nouvelles : un sondage accréditant Pierre Cohen, le candidat socialiste, de 53% des voix. Si ce chiffre peut s'expliquer, du moins, en parti, par la désobéissance (civique) des électeurs MoDem qui n'ont pas voulu jouer le jeu des alliances, cela montre en plus que ce sont bien ces électeurs plutôt de gauche qui se sont laissé "béarner" par le centrisme.

Mais ce 53%, s'il se traduit en un bon résultat, montre aussi que la politique est restée lisible, malgré tout. Car la ligne de Bayrou fonctionne lorsque la droite et la gauche sont globalement proche sur bon nombre de questions, dans un monde où la droite est incarnée par Juppé et la gauche par Jospin. Mais avec Sarkozy, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on ne risque plus de confondre les deux bords politiques. Du coup c'est le MoDem qui devient illisible.

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