Pages

20 juillet 2008

En lisant "Urgence Sociale" (contribution Nouvelle Gauche). Première partie.

Retour sur la contribution Urgence Sociale de la Nouvelle Gauche (j'en ai parlé un peu il y a quelque temps ici).

Je dois dire, tout d'abord, que cette contribution est un document remarquable pour la synthèse critique qu'il propose des nombreux mensonges idéologiques, économiques et politiques de Nicolas Sarkozy et des siens, mensonges qui réussissent à s'imposer mollement dans les cerveaux disponsibles qui n'ont pas, finalement, d'autre source de réflexion. Et comme souvent nos (ir)responsables du PS n'osent pas s'attaquer à ces contre-vérités, ne voulant pas prendre le risque d'être à contre-courant dans le torrent des idées reçues, et ne s'apercevant pas qu'ainsi ils se noyaient justement dans ce même courant. La tactique est importante, mais à un moment il faut lutter aussi contre une certaine vision des choses. On se rend compte que la moitié de la bataille en politique, et la partie qui constitue sa véritable dimension stratégique, ce n'est pas tant le développement d'un programme idéal, que la lutte autour d'une certaine définition de la réalité. La stratégie, c'est définir les problèmes ; la tactique c'est tenter de les résoudre. Dans cette lutte, notre Très Grand Homme (TGH) a été particulièrement malin. Le problème, en France, c'est qu'on ne travaille pas assez. Imposer "son" problème, c'était déterminer la topographie de la bataille à venir.

En somme, il s'agit de cette idée fausse qui était si précieuse à Nicolas Sarkozy pendant sa campagne, selon laquelle la France avait tout faux, était ancrée dans son passé crypto-stalinien, tandis que nos voisins et nos concurrents sont tellement modernes et sûrement décomplexés. Etaient visés : le droit du travail, L'État providence, et les Trente-Cinq Heures, bouc-émissaire et symbole de la fainéantise sponsorisé par L'État. La contribution de la Nouvelle Gauche cherche à tordre le cou à cet argument sur "ce qui ne va pas", et c'est déjà rendre un grand service. Evidemment, on n'a pas attendu cette contribution pour le faire, mais c'est quand même bien fait.

"Les Français travaillent moins que leurs voisins" affirment François Fillon et Nicolas Sarkozy. C'est FAUX. La durée moyenne du travail (tous emplois confondus25) est de 29,9 heures aux Pays-Bas et 31,9 heures en Grande-Bretagne, contre 36,1 heures en France.

Et même aux Etats-Unis, on arrive à seulement 33,7 heures de travail. Bravo, donc, pour le diagnostic, pour l'analyse critique.

(Il y a aussi une critique intéressante de l'application des 35 heures françaises, surtout la Deuxième Loi : absence de contrepartie en termes d'emploi, possibilité de compter les pauses ou les douches comme des heures de RTT... tout pour montrer que les 35 heures sont loin d'être l'hécatombe que l'on prétend.

Dans Urgence Sociale, on lit (et c'est en gras, c'est donc important) :

C'est le chômage de masse qui provoque la baisse des salaires dans le PIB. C'est le chômage qui plombe le financement des retraites et de la Sécu. C'est le chômage et la précarité qui pourrissent la vie quotidienne de millions de nos concitoyens (en particulier dans les "quartiers difficiles"). Lutter radicalement contre le chômage et la précarité doit être, pour les Socialistes, une priorité absolue.

C'est le bon sens, c'était même à peu près ce qu'on disait depuis longtemps, avant l'arrivée de notre Human Bomb idéologique, qui a réussi à remettre l'accent sur la fainéantise et le pouvoir d'achat (eh oui!). Recadrer ainsi les choses ne devrait rien avoir de révolutionnaire, et pourtant...

Je dois dire, ensuite, que si je m'attarde ici sur des éléments sur lesquels je ne suis pas d'accord, ce n'est pas pour dénigrer l'effort dans son ensemble, ni vraiment pour me placer contre, d'autant plus que l'ami Marc Vasseur l'a signé, ce qui n'est pas rien. A la rigueur, j'aurais envie de le mettre en valeur en engageant, modèstement, un petit dialogue.

Sur le diagnostic, donc, je suis globalement d'accord et globalement impressionné. Il ne manque, à mon avis, mais ce n'est pas là le rôle d'une contribution, un langage qui permettrait de mieux vendre ces idées critiques. Malgré les mots en gras, il manque peut-être les phrases chocs qui pourraient emporter le morceau, qui pourraient lancer la contre-mythologie qui nous fait défaut.

Voilà donc pour les applaudissements. La discussion sera pour le billet suivant.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire