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20 mai 2012

Apprenez la communication politique avec Jean-François

 

La semaine dernière nous avons proposé deux leçons de communication politique à partir d'exemples fournis par ce maître du Verbe et de la Logique, Jean-François Copé. Aujourd'hui nous nous demandons s'il ne faudrait carrément lancer une longue série de billets, tellement l'activité de Monsieur Copé est riche en enseignements pour les communicants débutants.

La semaine dernière, les élèves ont surtout retenu le principe du "c'est celui qui le dit qui y est", ce qui est, certes, un excellent point de départ. La communication copéïste dans sa riche complexité, pourtant, ne saurait en rester là. Nous allons étudier cette fois le principe philosophique des inversions de réalités, qui est présent dans "c'est celui qui le dit qui y est", mais qui a un champ d'application bien plus large.

Il peut être intéressant, sur le plan pédagogique, de commencer par un exposé logique. Ainsi, si votre adversaire, disons X, est reconnu publiquement comme ayant telle ou telle qualité q, nous dirons donc que X est q, ou X-q pour aller vite. Admettons que X-q est entré dans le grand cerveau public pendant un cycle de 24 heures, ce qui est évidemment préjudiciable pour votre intérêts. Que faire ?

Le contraire de q est non-q ou !q. Nous allons donc profiter de nos entrées dans la machine médiatique pour lâcher notre bombe : X-!q ! C'est-à-dire : pas seulement X n'est pas q, ce qui est à la portée de n'importe qui, mais X est non-q, c'est-à-dire le contraire de la qualité en question.

Premier exemple anécdotique : si votre ennemi dit : "il fait beau", vous êtes tenté de lui répondre "pas si bon beau que ça". Mais voilà l'erreur. Jean-François Copé, lui, saurait répondre sans la moindre hésitation "non, il pleut, il fait froid et il y a du vent". Vous voyez combien c'est efficace, digne d'un vrai chef guerre.

 

Passons maintenant à un exemple concret.

Le problème : François Hollande va aux Etats-Unis, rencontre Barack Obama en affichant une complicité bien plus grande et surtout bien plus naturelle que Nicolas Sarkozy qui pourtant ne se privait de dire "mon copain" et "my friend" à tout va. Pire encore, bon nombre de chefs d'État semblent être soudain convertis au principe de la croissance avant l'austérité, y compris David Cameron qui est non seulement britanique, mais conservateur.

Pourquoi c'est gênant : L'UMP, Sarkozy et Jean-François lui-même, ils ont l'air de quoi, après avoir répété pendant des mois que les idées Hollande étaient ridicules et qu'il serait renvoyé sur les roses dès qu'il aurait ouvert la bouche. Les gens pourraient même commencer à se demander ce que Sarkozy, avec toute son activité, a réussi obtenir sur le plan international.

Que fait Jean-François ? Il parle d'un « un marché de dupes ». Alors qu'on pourrait penser que l'Allemagne commençait à être isolée sur sa ligne rigoriste, à laquelle les Etats-Unis s'opposent depuis des mois, il se trouve qu'en réalité c'est la France qui est isolée :

« Je vois la stratégie des Américains, celle de nos amis allemands adossée sur une politique de réinitialisation solide », mais » concernant la France, il n'y a pas de stratégie aujourd'hui puisque le mot compétitivité « n'est jamais prononcé par aucun des membres du gouvernement Hollande », » a-t-il plaidé.

Ainsi, pour enfoncer le clou, Jean-François ajoute sa touche de génie : "Il va donc hypothéquer très gravement la place de la France dans une Europe en crise". Justement au moment où l'on commence à se dire que François Hollande en quelques jours a réussi à mieux placer la France, dans l'Europe et dans le monde, que tout ce qu'a fait Sarkozy pendant cinq ans, Jean-François nous arrête d'une phrase : non, ce n'est pas ça, c'est le contraire de ça.

 

Pourquoi c'est génial : C'est génial parce que c'est l'application parfaite du principe que nous avons exposé plus haut. Si on dit "Hollande réussit", il faut répondre : "Hollande échoue". Si on dit "ça va bien", il faut répondre "ça va mal". En ne variant jamais de ce principe, c'est la victoire assurée.

2 commentaires:

  1. Oui, cet imbécile oublie de préciser que pour lui compétitivité veut dire destruction du droit du travail...un de mes articles portant sur leur obsession de la compétitivité le démontre bien...
    Pauvre, pauvre Copé...
    Amicalement

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  2. Oui, il faut ce qu'il peut, le pauvre, sachant que Fillon et Juppé l'attendent après les législatives...

    Quant à la compétitivité, c'est juste ce que tu dis : le modèle, c'est le modèle chinois. Un manque total d'imagination, parmi d'autres défauts.

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