C'est la nouvelle manière de se défendre contre les accusations de racisme : "c'est mon combat contre l'antiracisme". Avant on se contentait de dire que les pires racistes, c'est les… au choix : Noirs, Arabes, Chinois. Le bon vieux "racisme anti-blanc". Ivan Rioufol a une catégorie sur son blog consacrée à la question. Voyez, le "racisme anti-blanc", c'est pire que le racisme ordinaire, parce que les blancs justement font tout pour aider les… Noirs, Arabes, etc. Ingrats.
En tout cas, c'est plus malin de dire qu'on lutte contre l'antiracisme. Je n'allais pas revenir à Rioufol encore aujourd'hui, mais comme c'est un grand théoricien de la lutte contre l'antiracisme, c'est toujours instructif. Voici ce qu'il écrivait en 2011, lorsque Zemmour fut condamné pour provocation à la discrimination raciale :
Cet empressement à sanctionner des propos effectivement déplaisants sur les comportements de certaines minorités vient rappeler que l'idéologie antiraciste, ce communisme du XXI è siècle, n'a pas encore rendu les armes. Cependant, je pense que ces mouvements prétendument exemplaires mènent des combats à sens unique qui les rendent pour cela indéfendables. Il y a de l'imposture derrière leur posture.
Lundi, à la suite les violences antisémites de Villeurbanne, Rioufol s'en prend à nouveau à la gauche :
il serait temps pour la gauche au pouvoir de se poser des questions sur les sentiments anti-juifs et plus généralement anti-français qui s’observent depuis longtemps dans les cités. Il serait temps qu’elle s’interroge sur ces mouvements prétendument antiracistes qu’elle protège en dépit de leur parti pris et des hiérarchies qu’ils opèrent dans les minorités à défendre. Il serait temps pour le PS qu’il confronte sa politique communautariste, destinée à s’attirer massivement l’électorat musulman, avec le risque de consolidation du multiculturalisme.
Dans l'optique délirante d'une guerre des civilisations, selon laquelle la mixité sociale ne peut être qu'une prélude à la domination islamiste, nos néo-réacs (ou néo-cons) ne comprennent pas pourquoi l'on devrait considérer les "musulmans" comme les victimes du racisme quand "ils" (mais qui exactement ?) sont les auteurs de violences et de discours parfaitement condamnables et execrables.
Le problème est justement dans ce "ils", qui permet à nos xénophobes de stigmatiser une population entière, des millions de personnes, à partir des actes d'une petite minorité. Les actes et discours antisémites doivent être condamnés et sanctionnés. C'est une question de droit. Mais la sanction ne doit pas concerner l'ensemble d'une population qui est par ailleurs impossible à définir.
Mohammed Merah a décidé que des enfants juifs devaient payer pour les actions d'autres personnes dans un pays lointain, prenant pour seul critère une appartenance et se contentant de tirer dans le tas. Il n'est pas difficile d'expliquer l'horreur d'une telle logique. Sous prétexte d'une défense de l'identité européenne (blanche et chrétienne), nous ne devons pas rendre reponsable une population entière pour les actions de quelques uns, uniquement par une logique d'appartenance à un groupe, dans une logique de lutte tribale dans laquelle les autres se valent tous.
Et il ne faut pas oublier que réclamer une sorte d'anti-antiracisme d'état (pour ne pas dire racisme), c'est faire l'impasse sur un déséquilibre fondamental. Les actions de quelques uns, si condamnables qu'elles soient, relèvent du droit pénal et de la responsabilité individuelle. Vouloir répliquer en engageant l'État tout entier, pour lutter contre "ces gens là", sous prétexte d'une défense de l'Occident, c'est confirmer cette logique tribale, et condamner l'État à n'être qu'une des tribus dans une guerre qui serait alors inévitable.
Tres pertinent!
RépondreSupprimerMerci!
RépondreSupprimerExcellent billet.
RépondreSupprimerEt je te cite: "stigmatiser une population entière, des millions de personnes, à partir des actes d'une petite minorité." c'est le lit de naissance du racisme. Quel qu'il soit.
Merci Homer. En effet, c'est cet effet de fausse loupe qui est gênant, et que nos éditocrates n'hésitent pas à invoquer dès qu'ils en ont l'occasion. Rioufol prend toujours ses précautions, mais on devine bien que le but est dire "les Arabes ont fait ça, il faut que les Blancs/les Français répliquent".
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