Sauvons d'abord les entreprises, on verra plus tard pour le reste. Telle est, sans même exagérer beaucoup, l'image du plan de "relance" de Nicolas Sarkozy. Non, je n'exagère pas, car il suffit d'écouter Laurence Parisot, qui s'exprime très clairement sur le sujet :
"La priorité des priorités aujourd'hui, c'est de sauver des emplois" donc "des entreprises", a affirmé mercredi la présidente du Medef Laurence Parisot, quelques heures avant une réunion avec les syndicats autour du chef de l'Etat pour rechercher un accord face à la crise.
Et elle reprend l'argument contre la relance de la consommation que l'UMP sert vraiment à tout les sauces depuis quinze jours :
Elle a également dit "souhaiter que la consommation tienne bon en France". "Mais il y a un ordre des facteurs", selon elle, et "la priorité c'est maintenir l'investissement" et non relancer la consommation, ce qui va stimuler les importations et "relancer l'économie en Chine, en Asie ou hors de France".
C'est la ligne. On a beau démystifier, réfuter, rien n'y fait. Il suffit de renchérir sur la crainte des importations (déjà invoquée lors du débat sur la "TVA sociale" - souvenez-vous de la TVA "anti-délocalisation") auprès de consommateurs qui savent bien que désormais tout est "made in China".
Voir les choses ainsi, c'est les voir uniquement du point de vue industriel. "Nos usines" contre les leurs : usines chinoises, coréennes, indonésiennes. On sait bien, pourtant, que, lorsque le consommateur achète son écran plat, la fnac se prend une grosse part. Et je suppose des fournisseurs, transporteurs et autre intermédiaires dont on devine bien l'existence. Sans parler des presque 20 % de TVA qui part directement au Trésor Public.
Le problème, du point de vue de l'industriel français, c'est toutes ces thunes ne reviennent pas directement au producteur, elles se diffusent dans la nature. Pas directement dans le portefeuille du capitaliste chinois, mais simplement dans l'économie.
Sans entrer de plein pied dans le débat économique, l'accent que l'UMP-MEDEF met sur l'investissement côté offre traduit une vision de la société où ce qui compte ce sont les producteurs, les gens étant dérisoire, de l'argent mal dépensé. De l'argent à la poubelle.
En revanche, sponsoriser l'industrie, "sauver" les entreprises, comme le dit Laurence Parisot, ces entreprises qui n'ont pas de commandes parce que personne ne veut consommer leurs produits, ces entreprises à la rigueur ne peuvent pas investir. Sans commandes, elles ont quand même tout intérêt à se débarrasser de tous ces ouvriers en surnombre, payés pour ne rien produire puisque personne ne veut rien acheté. Avec les aides de l'État, ces entreprises ont surtout intérêt à garder tranquillement l'oseille.
J'ai l'air un "gaucho" ? Prenez le dernier exemple en date : la BNP et la SocGen qui donnent tranquillement et respectivement 912 millions 700 millions d'euros à leurs actionnaires. C'est comme pour le Paquet et le Bouclier : donnons de l'argent à ceux qui en ont déjà, pour qu'ils puissent investir... à l'étranger, si ça leur chante. En Chine même.
En somme, nous allons traverser une grave crise économique. L'État soutiendra les très grandes entreprises qui pourront maintenir leurs cours en bourse et leurs trésoreries. L'industrie pourra faire le dos rond. Le peuple se débrouillera pour survivre.
6 commentaires:
ton article me fait monter la tension.
Rends toi compte que je viens de commencer mon weekend en lisant le dernier billet de dagrouik et le tiens, comment veux tu que je ne dises pas au premier libéral que je croiserais "casses toi pov'con"!
Cette analyse est tellement limpide que je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne la comprend pas; Feriat-il volontairement la sourde oreille ?
:-))
peuples,
La relance, c'est la relance de la guerre des classes.
superpado,
Pardonne-les, car ils ne savent pas ce qu'ils font. Ah, si, ils savent? Alors...
Monsieur P.,
Volontairement? Ca dépend. Ils sont peut-être sourds tout simplement.
Sauver les entreprises c'est sauver les emplois ? Cette Mme Parisot est un éclat de rire (jaune). Il suffit de voir les résultats de PPR et les suppressions de postes que vont subir la FNAC et Castorama pour comprendre que donner un kopek à une boite n'a jamais rien fait pour sauver les emplois...
Compte tenu des capitalisations boursières, même après la crise, il ne devrait pas y avoir un chômeur dans le monde si l'argent frais avait un rapport avec l'emploi...
Mister Cham--
Bien sûr. C'est le marché du travail qui détermine les salaires, pas les bénéfices de la boîte, qui n'a jamais intérêt à payer ses salariés plus que le minimum absolu (déterminé en fonction du marché).
Parfaitement d'accord. J'avais même fait un billet là-dessus il y a qqs mois. C'est ici.
L'idée donc de produire d'abord pour ensuite redistribuer est une foutaise.
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