22 avril 2009

Je suis une bande de jeunes

Il va donc falloir commencer à défendre "les bandes" ainsi que leurs droits. Tel serait le rêve des sarkozyëns : enfermer la gauche dans une défense "droitsdelhommiste" de ces gens dont tout le monde a si peur.

La machine a yakka s'est donc mise en route, cette fois en mode judiciaire et législative. Une loi, après tout, ne coûte rien, et comme nous le verrons, ne fait rien, à part, toujours, du bruit. Ce qui donne ceci :

Il [le Président de la R.] entend créer un nouveau délit, dans le cadre d'une proposition de loi qui doit être examinée fin mai devant l'Assemblée. Désormais, participer à une bande violente pourrait être puni de «trois ans de prison et 45.000 euros d'amende».

Le problème, ce sont les anonymes dans la bande. On ne sait pas s'ils ont fait quelque chose ou pas, et surtout on ne peut rien prouver, mais on voudrait les incarcérer quand même. Parce que ce sont des gens pas bien. Il faudra quand même prouver qu'ils font partie de la bande. Qu'est-ce qu'une bande au juste ? Un expert répond :

A partir de combien de personnes forme-t-on une bande?

Aux Etats-Unis, c’est à partir de trois personnes. Après, c’est dans l’intérêt de la police de distinguer une bande d’un groupe de copains.

C'est "dans l'intérêt de la police de distinguer une bande d'un groupe de copains" ! Je dirais que c'est dans l'intérêt des groupes de copains que la police réussisse à faire cette distinction. Par précaution, cepedant, il faudrait éviter de faire partie des groupes de copains d'au moins trois personnes si vous souhaitez éviter des gardes à vue inutiles.

Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Il est impossible de décider qui fait partie d'une bande, la ligne entre "groupe de copains" et "bande de jeunes délinquants" sera bien floue. Rien n'empêchera le soupçon de "faire partie de la bande", ce qui pourra justifier une nouvelle inflation des gardes à vue. Qui seront sans suite, puisqu'on ne peut pas prouver l'appartenance à une bande. "Je vous jure monsieur, les autres c'est une bande, moi je suis juste copain avec eux."

Je voudrais donc proposer un amendement à cette proposition de loi, qui obligerait les bandes à maintenir des listes précises de leurs membres et à leur fournir des cartes attestant leur appartenance. Je laisse aux vaillants députés UMP le soin de décider par exemple à combien de bandes un même déliquant peut adhérer et des autres modalités. Il paraît évident, en revanche, que l'État doit faire respecter l'obligation de donner des noms aux bandes afin de mieux cerner leurs territoires et leurs responsabilités. Le législateur pourrait même aller jusqu'à suggérer certains noms, comme les "Jets" et les "Sharks", même s'il semble probable que la jeunesse de la France pourra très bien inventer ses propres noms de bande. Bien sûr, l'adhésion à une bande ne sera validée par l'État que lorsque la demande d'adhésion sera accompagnée d'un échantillon d'ADN.

De plus, afin d'éviter les confusions, il semble tout aussi nécessaire de créer un Registre National des Groupes de Copains, avec une structure assez semblable à la jurisdiction des bandes (cartes, noms, ADN), ceci pour savoir, en cas de litige, si la peine "bande" doit s'appliquer, ou si au contraire nous sommes dans le cas du "groupe de copains". Tout cela pourrait paraître compliqué à gérer, mais à ceux qui disent ça, je répond : "Tel est le prix de notre sécurité, de celle de nos enfants."

Vogelsong vient d'écrire :

Le sécuritaire est le Fort Alamo de la droite. [...] La lutte contre l’insécurité est un leurre. Pour la droite, c’est le contrôle est l’ordre social qui motive les mesures politiques. La manœuvre consiste à entretenir l’insécurité pour accentuer la pression sécuritaire. Réduire l’insécurité entraînerait le tarissement de la manne élective. C’est dans ce cloaque gluant et empesté, que brasse paisiblement la droite française.

Il a raison.

5 commentaires:

superpado a dit…

Pour les cagoules, je me souviens très bien des années 70, à Aix en Provence, pendant les manifs "pierre overney" jeune militant d'extrème gauche qui avait été assassiné par des vigiles de chez Renault.
A cette époque nous avions repérés des jeunes de l'UJP (organisation des jeunes Gaullistes) qui venaient, foulards sur la figure provoquer et disparaitre.
Qu'il n'y ait plus de cagoules dans des manifs comme celles de Strasbourg par exemple ne génera pas les manifestants, au contraire.
Pour les bandes il est clair que ce n'est que de l'affichage, une loi de plus qui n'empêchera rien sur le fond.

omelette16oeufs a dit…

D'accord avec toi, superpado, pour les cagoules dans les manifs, même si la question du voile se pointe à nouveau (des musulmanes pourraient-elles faire une manif pour affirmer le droit de se voiler?).

De façon générale, il n'est pas essentiel de pouvoir se masquer pour une manif, tant que le droit de manifester reste intacte par ailleurs.

superpado a dit…

A propos de cagoule!!
http://www.mediapart.fr/club/blog/ereclus/230409/les-jeunes-cagoules-qui-caillassent-la-caravane-ump-fable-moderne-sur-la-co

Le_M_Poireau a dit…

Bravo ! Bel article !
«Je vous jure monsieur, les autres c'est une bande, moi je suis juste copain avec eux.».

D'ailleurs, je tiens à préciser aux autres commentateurs qui passeraient par là que je ne connais même pas ce blogueur, c'est même pas un copain !
;-)))

omelette16oeufs a dit…

superpado,

Eh oui, comme d'habitude avec l'UMP, c'est celui qui le dit qui l'est.

M. P.,

Merci! Et oui, pour être prudent il faudrait toujours préciser qu'on n'a pas des copains. C'est comme la drogue douce : tu commence par un copain et deux et puis patatras! tu te retrouves dans une bande criminelle.