31 mai 2012

Mesurer la précarité

 

Bruxelles continue de rappeler qu'il y aura d'autres "efforts" budgetaires et que le marché du travail français. Sur ce dernier point, la Commission fait un constat intéressant :

Elle estime par ailleurs que le marché du travail constitue un "point noir" et que "rien n'a été fait" pour remédier à une situation où il est très difficile d'obtenir un Contrat à durée indéterminée. La proportion de CDD en France est plus importante que dans la moyenne de l'UE et les salariés restent "trop longtemps" en CDD, précise cette source.

Donc le précariat à tout va n'est pas la solution à tous nos problèmes. C'est déjà une bonne nouvelle, mais à portée limitée.

30 mai 2012

Normal : salubrité de l'institution

 

À propos de l'intervention de François Hollande, Thomas Weider écrit :

Surpris, peut-être, que son interlocuteur ne relève pas cette "normalité" à laquelle les précédents présidents ne nous avait pas habitués, François Hollande se fit lui-même - il en a l'habitude - le commentateur de sa propre démarche : "Je ne vous ai pas demandé de venir à l'Elysée", fit-il ainsi remarquer à David Pujadas vers la fin de l'interview. "Je préfère faire simple", lui a-t-il aussi expliqué. C'était une façon de rappeler que la "normalité", en termes de communication politique, n'a d'intérêt que si elle est se donne à voir comme remarquable. Ce qui amènera sans doute François Hollande à se poser un jour la question : comment tirer profit dans la durée d'une "normalité" qui ne tire de sa valeur que parce qu'elle apparaît à un moment donné comme exceptionnelle ? Comment, en somme, éviter avec le temps que la "normalité" ne se banalise ?

29 mai 2012

Zemmour viré : souvenez-vous de PPDA ?

 

Eric Zemmour ne pourra plus vendre ses petites doses de haine réactionnaire sur RTL. Heureusement pour la liberté d'expression, il ne lui manquera pas d'autres surfaces de vente. En général, je n'aime pas les mesures qui suppriment la parole à qui que ce soit. En revanche, si RTL estime que la nostalgie du petit blanc dans la moulinette de la provocation-spectacle ne genère plus le buzz recherché, c'est peut-être un signe du temps malgré tout positif.

Naturellement, la droite court à sa défense, ce martyr sacrifié sur l'autel de la bien-pensance. Quant aux blogueurs républicains (ceux qui ont décidé que tout ce qui est contre la gauche va dans le sens des valeurs républicaines), Zemmour, qui ne faisait que tâcler Taubira, était : "une indispensable bouffée d’air frais" et ils se demandent comment l'intolérance va continuer à s'exprimer.

28 mai 2012

Les lois Hartz et le contre-modèle allemand

 

Tout le monde se souvient du fameux "modèle allemand" qui allait sauver la France à l'époque où Sarkozy ignorait encore que c'était la protection contre la viande halal et la sortie de Schengen qui allaient sauver la France.

Juan écrivait en février :

Depuis bientôt deux ans, Nicolas Sarkozy a choisi le modèle allemand sans qu'on sache vraiment lequel. Il ne cherche pas tant à singer la politique économique ou sociale du gouvernement allemand que de coller au plus près de sa voisine chancelière.

Et j'écrivais :

26 mai 2012

Chers blogueurs de droite...

 

Nous les blogo-gauchistes, nous nous interrogeons beaucoup sur ce que va être cette droitosphère qui va bientôt remplacer la gauchosphère maintenant que sa cible unique est parti au Maroc. Nous nous interrogeons déjà parce que curieusement, malgré la victoire de François Hollande et la défaite quasi simultanée de Nicolas Sarkozy, il ne nous manque pas des choses à dire.

24 mai 2012

Exploiter la xénophobie

 

L'autre jour je parlais du problème que nous avons aujourd'hui pour communiquer ce pour quoi la xénophobie politique n'est pas acceptable. Jusqu'à la prise de fonction de Nicolas Sarkozy en 2007, il y avait Les repères historique et moraux qui servaient encore récemment pour fonder un consensus qui plaçait le Front National et ses idées dans un hors champ politique. Depuis le fameux "siphonnage" des électeurs du Front National, et la poursuite d'une politique xénophobe censée garder ces électeurs dans le giron de l'UMP, et depuis que Marine Le Pen a mis en sourdine l'antisémitisme et négationisme qui étaient les marques de fabrique de son parti, ce n'est plus une évidence, pour une partie significative des hommes politiques de droite, ainsi que pour une partie signficative de l'électorat, qu'il est repréhensible d'exploiter politiquement et de valider la xénophobie.

22 mai 2012

La religion du pouvoir

 

Ce matin, Jean-François Copé a dit ceci (Source : variae.com) :

« je vais vous dire, je plaide coupable avec regret mais c’est un arbitrage que nous avons eu à rendre et qui était difficile, dès lors que nous avions 317 députés sortants et qu’une bonne part d’entre eux se représentent et ont un ancrage très remarquable sur leur territoire, il était extrêmement difficile de les sacrifier. Voilà pourquoi j’ai pris avec mes amis de l’UMP cette décision qui nous coûtera en termes d’amende, et chacun doit comprendre que dans la période qui est la nôtre, il nous faut absolument avoir le maximum de députés et que cela passe par le poids, l’ancrage local de beaucoup d’entre-nous […] je suis moi un grand militant de la parité, j’ai été l’auteur d’une loi qui avec Marie-Jo Zimmermann prévoit qu’il y ait la parité dans les conseils d’administration des grandes entreprises françaises ».

21 mai 2012

L'UMP accepte enfin l'islamophobie

 

Marine Le Pen dit : "je suis la chef de l'opposition au système".

Marine Le Pen dit : "l'immense majorité des électeurs de l'UMP se sentent beaucoup plus proches de nous que de leurs dirigeants qui tendent à gauche."

Il y a seulement quelques mois, devant de tels propos, on aurait conclu à l'hyberbole habituelle de la famille Le Pen. Aujourd'hui, alors que Le Pen fait un score, certes impressionnant, mais seulement un peu mieux que son père en 2002, nous sommes obligés de la prendre un peu plus au sérieux.

La première phrase vise Mélenchon d'abord, l'UMP ensuite. La seconde explique, à propos de l'UMP, que Madame Le Pen est déjà, idéologiquement, à la pointe, à la tête, du sentiment populaire de la droititude.

20 mai 2012

Apprenez la communication politique avec Jean-François

 

La semaine dernière nous avons proposé deux leçons de communication politique à partir d'exemples fournis par ce maître du Verbe et de la Logique, Jean-François Copé. Aujourd'hui nous nous demandons s'il ne faudrait carrément lancer une longue série de billets, tellement l'activité de Monsieur Copé est riche en enseignements pour les communicants débutants.

La semaine dernière, les élèves ont surtout retenu le principe du "c'est celui qui le dit qui y est", ce qui est, certes, un excellent point de départ. La communication copéïste dans sa riche complexité, pourtant, ne saurait en rester là. Nous allons étudier cette fois le principe philosophique des inversions de réalités, qui est présent dans "c'est celui qui le dit qui y est", mais qui a un champ d'application bien plus large.

19 mai 2012

Fin des blogs de gauche ? Le cache-sexe antisarkozyste

 

Les médias s'interrogent sur la suite des blogs de gauche, prédisant leur disparition ou leur remplacement par un équivalent de droite.

Voici quelques exemples :

  • Le Monde annonce l'arrivée d'une droitosphère, Romain Pigenel réplique en expliquant la particularité galvanisante de Sarkozy en tant que sujet politique ;
  • L'Express demande : "La défaite de Sarkozy va-t-elle tuer les blogs de gauche?" ; Nicolas J. réplique : "Les blogs de gauche ont un bel avenir devant eux : ce sont les derniers – les seuls ! – à faire de la politique."
  • Le Figaro parle d'une reconversion délicate et Juan met des bons bémols.

Pour résumer, les journalistes voudraient que les choses suivent une logique naturelle et équilibrée : anti-hollandisme et anti-sarkozysme sont symétriques, l'alternance concerne aussi les blogs. Mais surtout, ils ne voient dans les blogs de gauche que leur antisarkozysme, et la conclusion s'impose toute seule : sans Sarkozy, pas de blogs antisarkozyste, pas de blogs de gauche.

18 mai 2012

La droite se droitise

 

Repartons de cette citation, de Rioufol, que j'ai mentionnée dans un billet précédent :

En réalité, le scrutin était gagnable, dans une société convertie majoritairement aux valeurs de la droite. Mais deux millions de Français ont préféré voter nul ou blanc, souvent dans le but de sanctionner un président ayant redécouvert trop tardivement son intérêt pour la nation.

Rioufol voit dans la victoire de François Hollande la preuve que la société "se droitise", puisque les gens qui auraient pu voter droite ont préféré voter blanc. La logique est imparable, vous en conviendrez. Seule une victoire de Mélenchon aurait pu signifier un plus radical virage à droite.

Dans le même billet, j'ai essayé de réfuter cette affirmation, elle-même fondée sur la supposition que La Droite puisse réunir le spectre allant des bayroutistes qui ont voté blanc (et non Hollande comme Bayrou) au sarkozysme libéré de la croisade héroïque des quinze derniers jours de sa campagne, en passant par le Front National et la Droite Populaire. La question mérite qu'on y retourne.

17 mai 2012

La logique du cumul : Najat Vallaud-Belkacem a raison

 

Ce n'est pas parce que nous avons enfin un Président socialiste que nous allons arrêter de chipoter. Commençons avec cette annonce :

Ayrault annonce sur France 2 que tout ministre battu aux législatives ne restera pas au gouvernement. «Il y a l'esprit de responsabilité, c'est-à-dire que tout ministre qui se présente aux législatives et qui ne sera pas élu ne pourra pas rester au gouvernement», a-t-il déclaré

Normalement, je n'aurais rien dit. Mais il se trouve que j'ai déjà traité ce sujet, en 2007. Au moment de son premier gouvernement, avant les législatives, François Fillon avait à peu près la même chose.

16 mai 2012

Copé François-Jean L'envers au monde

 

Petite leçon de communication politique de la droite droitisée prodiguée par Monsieur Sincérité lui-même, le magnifique Jean-François Copé. Aujourd'hui nous allons regarder deux petits exemples survenus récemment qui montrent bien comment il faut s'en prendre à son adversaire politique.

14 mai 2012

Il faut être meilleurs

 

C'est mon slogan imaginaire pour les législatives : "il faut être meilleur". J'avais commencé une série de billets sur ce qui serait ma campagne présidentielle idéale. Le slogan était "Les énergies de la France". Il y avait quatre billets en tout (j'ai dû passer à autre chose), dont deux consacrés au fret férroviaire.

Je ne promets de faire une série de billets cette fois. C'est hollandais : je ne m'engage pas si je ne suis pas sûr respecter mon engager. Sous Sarkozy on était libres de s'engager à tout va, cela n'avait aucune espèce gravité.

13 mai 2012

Défaite du bonhomme, de ses idées et des idées des voisins

 

Depui la défaite de Nicolas Sarkozy, avec sa sortie presque réussie, une idée ressurgit par-ci par-là, selon laquelle la victoire de Hollande n'était pas écrasante, et que si on corrige le score pour prendre en compte l'anti-sarkozysme, lié à la seule personne de Nicolas Sarkozy (Fouquet's, pépettes, talonettes) et sans lien à sa politique, la victoire serait en réalité pour la droite. Les votes blancs en fournissent la preuve irréfutable.

12 mai 2012

Pour choisir La France, il faut choisir Copé ?

2

 
Pire que "Ensemble tout devient possible", pire « Ensemble pour la Majorité présidentielle » (législatives 2007), pire que "Quand l'Europe veut, l'Europe peut" (européennes 2009), pire que «La France change, ma région doit changer aussi» (régionales 2009), pire que "La France forte", le slogan UMP pour les législatives – "Ensemble choisissons la France" annonce bien la couleur de ce qui nous attend pour les années à venir. Comme à l'UMP on ne peut jamais avoir tort, car la défaite de Sarkozy était malgré tout une victoire pour ses idées, une grande victoire pour la droite du fait qu'ils n'ont pas était humiliés totalement, oubliant que le fait même d'être le candidat sortant procure un réel avantage électoral. Normalement.

10 mai 2012

Changement : dites « bonjour » aux Eléments

Ce blog vient de changer de nom et d'apparence. Ce n'est pas facile pour moi de lâcher la formule qui m'a si bien servi pendant ces cinq dernières années, mais "La pire Racaille" sent trop le sarkozysme pour être utile, pour être motivant. C'est le moment de couper.

Le soir du 6 mai, j'ai dit que j'allais réfléchir à une nouvelle formule. Moins de hargne, plus de suggestion, de réflexion, y compris dans le vide. Parfois, la blogosphère ne semble pas propice au développement d'idées, mais je trouve plaisant de réfléchir tout haut même si c'est pour enfoncer des portes ouvertes. Et tant qu'il y aura des Jean-François Copé, il faudra quand même revenir de temps en temps à la bonne vieille désintox. Ou même beaucoup si jamais on se retrouve dans une cohabitation…

Le nouveau nom – et le nouveau look (qui est encore expérimental pour l'instant) – sont censés correspondre à l'idée que les blogs peuvent participer à ce grand travail de reformulation et de réinvention des mots et des idées politiques, miniscule morceau par miniscule morceau.

9 mai 2012

Une majorité UMP-Droite Populaire : quand on y réfléchit, c'est Sarkozy

 
Jean-François Copé, qui n'a aucune difficulté avec les idées du Front National si cela peut servir une campagne présidentielle, ne veut pas du Front National dans des alliances pour les législatives. Il met les points sur les i.
La ligne de l'UMP "est très claire, il n'y aura pas d'alliance électorale ni de discussion avec les dirigeants du Front national" et si localement, certains engagent de telles démarches, "on en tirera toutes les conséquences au niveau national, car ce sera contraire à la ligne de l'UMP", déclare le secrétaire général de l'UMP.
Il y a pourtant la Droite Populaire, sorte de Front National interne à l'UMP. Et à la Droite Populaire, on ne comprend pas cette logique, surtout depuis Marine Le Pen a lâché l'antisémitisme (hors Autriche). Jean-Paul Garraud, député Droite Populaire (Gironde) se demande s'il ne faut pas être "pragmatique" plutôt que de rester "dans les blocages idéologiques".

7 mai 2012

Les Echos proposent dix raisons pour l'échec de Sarkozy. Voyons cela.

La façon dont la défaite de Sarkozy sera interprétée va avoir une certaine importance pour la suite des événements. Parallèlement, on aime utiliser le mot "échec" avec le nom de Sarkozy, et maintenant personne ne viendra nous contredire. Sauf peut-être Valérie Pécresse, Nathalie Kosciusko-Morizet ou l'incomparable Jean-François Copé, qui croient encore à la réussite de leur programme, de leur héros, de leur campagne et même à la survie de leur formation politique. En tout cas, Les Échos ne mâchent pas leurs mots, et présentent Les dix raisons de l'échec de Nicolas Sarkozy. Voyons si on est d'accord.

6 mai 2012

6 mai 2012

François Hollande a été élu tout à l'heure. Je suis soulagé, content, mais l'émotion réelle n'a pas encore frappé. Je pense me réveiller demain avec un optimisme nouveau. Ce n'est que la politique, mais en temps quelque tonalité de l'existence est en train changer.

Nous avons évité une catastrophe irrépérable. Nous avons aussi la chance d'avoir, avec François Hollande, un président si différent de Nicolas Sarkozy. Pendant cinq ans, ou plus, on finit par croire que la courbe de l'histoire va toujours dans le sens de plus d'hypocrisie, plus de manipulation, et qu'il faut, pour vaincre, jouer le jeu. Je ne m'attendais pas à cette issue, avec un président qui renverse le jeu, qui fait une force du fait de ne pas être habile comme son prédécesseur. La courbe va dans un nouveau sens, je ne sais lequel. On verra. On est content.

Demain je prendrai la mesure d'aujourd'hui. Je salue quelques amis ce soir, parce que des soir comme celui-ci n'arriveront pas souvent. Merci donc à Juan, Marc, Dagrouik et puis tous les Leftblogs. Vous avez fait beaucoup.

5 mai 2012

Précarité et modèle social : une idée

Fin de campagne oblige, je ne vais pas pester contre l'un ou l'autre des candidats présidentiels. Peut-être grâce au cessez-le-feu, j'étais en train réfléchir au système social français, de manière un peu détachée. Je venais de lire ce papier dans The Economist qui parle du chef de la BCE, Mario Draghi, et le cocktail d'austérité et de croissance qu'il recommande pour l'Europe. J'ai lu aussi cet édito du Monde, où est exprimé le regret que la campagne présidentielle n'a pas permis d'engager le débat sur les vraies questions de mondialisation, de l'international en général. Ils n'ont pas tout à fait tort : la focalisation sur la personalité de Nicolas Sarkozy (focalisation souhaitée par l'intéressé) et sur la question de l'extrême droite et ses thèmes (souhaitée par le même candidat) ont en effet dominé la couverture médiatique, et par conséquent la réalité couverte.

4 mai 2012

L'Axe du Mal

À Nicolas Sarkozy, en briseurs de digues, en dépuceleur de pudeurs Républicaines (on ne dit plus "droite décomplexée" mais "droite dépucelée"), il ne manque que du temps, le temps d'aller assez loin pour atteindre enfin le coeur de l'électeur xénophobe. Sûrement il y a quelque part une formule magique qui débloque le Niveau 9 du jeu, où soudain le compteur explose et enfin tous les électeurs de Marine Le Pen l'acceuillent bras ouverts, le couvrent de bisous et le portent en triomphe vers l'Élysée. Il fait siffler les journalistes, les élites, mais ce n'est toujours pas assez. Que faut-il dire ? Quel bouc émissaire ? Quelle formule pour enfin être assez droite ? Il cherche. Buisson cherche. Guéant cherche. Ils n'ont plus que quelques heures.

3 mai 2012

Obligation de nuire : un deuxième quinquennat avec Sarkozy serait pire que le premier

Le débat d'hier soir semble avoir remis les pendules à l'heure. François Hollande a brisé l'élan du Très Grand Homme (TGH), cet élan artificiel qui allait de l'anniversaire de Julien Dray, au Trocintox où étaient présents au moins 60 millions de français (certains DOM se sont déplacés intégralement). Le spectre d'un Nicolas Sarkozy capable de manipuler sa propre image commençait à refaire surface, et on pouvait se laisser aller à imaginer que pendant au moins quelques heures, dimanche, une proportion suffisante d'électeurs seraient hypnotisés en allant au bureau de vote pour que le TGH renverse in extremis son impopularité qui dure pourtant depuis années.