30 août 2007

Ménage

Je retrouve l'internet à plein temps et je reprends contact avec la blogosphère après quelques semains de connectivité intermittente et de défaillances matérielles. J'ai pu remarquer que Juan nous offre un nouveau graphisme, épatant, avec ces lunettes de Big Sarko.

Sinon, la rentrée, c'est peut-être aussi le moment de faire le ménage, cette fois dans mon blogroll. Notamment à propos de Radical chic, où l'on trouve, entre autres, ces paroles ineptes, qui se veulent, je suppose, chics :

Vaste programme. En attendant d'en être là, ça serait pas mal que le PS se taise. Non ?

Que dire? Magnifique exemple de l'esprit d'ouverture à gauche. Guillermo, c'est peut-être Michel Rocard. C'est grâce à Dagrouik que je suis tombé dessus:

Je voulais dire quelque mal d'un bande de précieuses ridicules de gauche qui tiennent un blog où on peut lire des conneries bien léchées, mais je ne le ferai pas directement. Ils glosent de la supposée personnalité incertaine de Royal, ou des espoirs déçus portés par notre grognasse rose. A vous de trouver de qui je parle, mais je vous rassure ils sont chic, très bobo-parisiens, et il y'a toujours, au delà de l'écriture prétentieuse, des bonnes choses à lire. Mais finalement tout exude le toc et la vanité, au point que la lecture en vienne insupportable. Tout cela est un peu prétentieux de leur part...

Je vais donc suivre l'exemple de Juan:

c'est radical-chic ?

Merci de l'avoir signalé. Je les ai retiré de mes liens. Enervé.

Je sais que ça risque d'être dur pour eux, mais tant pis.

23 août 2007

Le partage de l'échec

Très rapidement, quelques remarques sur le voyage de Kouchner en Irak.

D'abord, on comprend que la photo-op avec la famille Bush, ainsi que le choix du lieu de vacances de notre Très Grand Homme (TGH), font partie d'une stratégie coordonnée qui est plus lourde de conséquences qu'une simple réaffirmation de l'amitié franco-américaine.

L'Irak est-il l'aboutissement de cette stratégie, ou simplement un signe de plus de la soumission française? Difficile de dire. Tout indique que Sarkozy croit que la France a une carte à jouer en Irak, comme si l'échec américain n'était pas total. Si il y a une carte à jouer en Irak, ce n'est sûrement pas la carte américaine.

17 août 2007

Irrésistible

En plus d'être déconnecté, je n'ai même plus avec moi le numéro du Fig offert par l'hôtel. Voici donc un billet basé seulement sur mes souvenirs de lecture de ce matin (15 août).

Il s'agit d'un portrait de Xavier Bertrand. Qui parle, parmi d'autres sujets, de la suppression du droit de grève dans les transports (service minimum, ou grève minimale). D'après le Ministre, les syndicats savent que de toute façon, ça va bouger. Même si le gouvernement ne faisait rien du tout, ça bougerait. Car en réalité, ce que fait Sarkozy, ce n'est pas de la politique. Il est l'incarnation de la modernité. Il y avait comme une marée montante. Le chiraquisme et le socialisme étaient des vielleries qui voulaient empêcher cette grande vague de nouveauté. Sarkozy, ce n'est pas de la politique; Sarkozy, c'est cette vague. Irrésistible. Irrépressible. Pourquoi chercher à résister? Autant essayer d'arrêter la terre de tourner. Le gouvernement n'y peut rien. Ça va se faire de toute façon.

Petit à petit cette euphorie va se calmer. Mais pas d'elle-même.

Les médias français évitent les vacances de Rachida Dati

Je retrouve brièvement l'usage du web, et je suis surpris de voir qu'une recherche Google "rachida dati vacances sarkozy" ne donne que très peu de mentions dans les médias traditionnels de la présence de Rachida Dati sur le bateau de vacances de notre Président: Paris Match, le Nouvel'Ops, et La Tribune.

A vrai dire, je m'en fous que Dati soit dans le bateau ou pas. Au vu de ce que veut faire Sarkozy, c'est vraiment le cadet de nos soucis. Sauf que les cachotteries sont bizarres. Et surtout que l'étouffement effectif de l'affaire est pour le moins inquiétant. Rien dans Libé, rien dans Le Monde?

Très étrange.

UPDATE: LCI en parle (brièvement).

15 août 2007

Dans la famille des losers...

Titre dans Le Monde daté du mardi 14 août: Nicolas Sarkozy, "adopté" par les Bush, affirme que "dans une famille, on peut avoir des désaccords".

En effet, Sarkozy a reçu le traitement familial - femme, enfants, grand-parents -, même si la souffrante Cécilia a voulu gâcher un peu le tableau (l'angine au mois d'août, ce n'est pas tout à fait impossible, mais dans ce cas pourquoi faire poireauter les Bush pendant une heure?). Le Très Grand Homme (TGH) reprend la métaphore pour affirmer justement son indépendance, et accessoirement celle de la France, à l'égard de l'ancienne hyperpuissance, en réponse aux doutes émis par le pas si loyal Raffarin (il faudrait creuser un peu ce rapport-là aussi). Bien sûr il passe à côté de l'essentiel. A dessein, bien sûr.

Le brave Raffarin avait dit au JDD:

Nous avons des valeurs communes avec les Américains, mais soyons vigilants, notre message au monde est différent.

Raffarin ne fait là que réaffirmer la politique à l'égard des Etats-Unis qui est celle de la France depuis de Gaulle, et qui, sous Mitterrand et Chirac dans l'ère post-soviétique, s'est spécialisée pour un monde unipolaire, avec la France se présentant comme interlocuteur alternatif.

Si désormais nous sommes tous dans la même "famille", la France peut-elle continuer à jouer ce rôle?

Masse critique

La vie en déconnecté. Je tombe sur l'éditorial en une de Ouest France. Je ne sais pas si ce journal est toujours le plus vendu de la France, mais les éditos sont d'assez bonne qualité, le patron, si je me souviens, étant vaguement gauche catholique.

Je tombe donc sur cet éditorial dans le numéro du lundi 13 août qui est étonnamment critique à l'égard de notre Très Grand Homme (TGH). Le titre est modeste : "Les Européens face à Nicolas Sarkozy". Il contient cependant plusieurs des arguments essentiels de l'anti-sarkozysme. On les trouve assez souvent dans la blogosphère, mais assez peu dans des lieux aussi consensuels que l'édito de première page de Ouest France. Quelques exemples :

En politique intérieure, notre Président peut dire ou laisser dire qu'il décide de tout, qu'il crée toute nouveauté. Mais les autres Européens ne peuvent admettre qu'il se mette constamment en avant.

L'auteur cite alors l'épisode cécilio-libyen, ainsi que les conflits budgétaires entre Sarkozy et l'Allemagne notamment.

Enfin, comment accepter facilement que le président français affirme à la fois son désir de voir l'Union européenne - au moins la zone euro - dotée d'une sorte de gouvernement économique et la nécessité pour la France de tourner le dos, pour sa dette publique, à tous les engagements européens. L'irritation est ici particulièrement vive dans une Allemagne dont le gouvernement consacre courageusement les retnrées fiscales supplémentaires à la dimunition de la dette.

Et pour conclure:

Peut-être la majorité des médias français, si avides de présence présidentielle, si prompts à glorifier, devraient-ils davantage expliquer à leurs lecteurs/auditeurs/spectateurs qu'il n'est pas utile d'irriter ceux qui ne demandent qu'à accepter une coopération créatrice, mais égalitaire. Les problèmes réels sont suffisamment sérieux pour qu'on les débarrasse d'éléments psychologiques inutiles.

"Eléments psychologiques intuiles"? Mais c'est le sarkozysme tout entier que notre auteur est en train de jetter aux orties! Enfin je lève la tête pour vérifier le nom de cet auteur : Alfred Grosser, ancien professeur à l'Institut d'études politiques à Paris.

Si j'étais à la place du TGH, je commencerais déjà à m'inquiéter. Le fait qu'un texte pareil apparaisse indique que les mots et les idées de la résistance sont en train de se solidifier. La tactique de Sarkozy consiste à avancer vite pour ne laisser aucune prise à ses adversaires. Le domaine international risque d'être le domaine où ses contradictions seront d'abord visibles. Mais il faut des plumes comme celle du Professeur Grosser pour atteindre cette masse critique où la médiaréalité pourrait enfin reconnaître que le sarkozysme puisse être critiqué.

Le style flambeur

Quand il sera publié, ce billet sera déjà vieux de quelques jours. On est aujourd'hui le dimanche 12 août. Sarkozy vient de retrouver son futur vieux pôte George W. Bush. Sur la couverture du JDD, que je n'ai pas acheté, j'ai vu la photo des deux pôtes sur le bateau des Bush, avec Bush Sr. au volant.

Dans Le Monde d'hier, daté d'aujourd'hui et de demain, en couverture dans une analyse par une journaliste dont le nom m'échappe pour l'instant, on s'acharne à sonder la "rupture" diplomatique sarkozyste tout en soulignant sa continuité avec les grandes lignes de la diplomatie française. Il semblerait que la rupture est surtout dans le style. De là à dire que la rupture n'est que du style, il y un pas que Le Monde n'est pas près à franchir. Pourtant cela semble logique.

Il y a pourtant quelques petites piques. Le coup de fil de Sarkozy à Poutine à propos de l'accord Total-Gazprom qui aurait été "maladroit", par exemple. L'analyste du Monde insiste sur le refus de Chirac de rendre visite à Poutine et à Bush. En effet, Chirac tenait à cette hauteur de vieux sage que les jeunes Bush, Blair, et Poutine ne pouvaient atteindre. Sarkozy sera actif, mais, visiblement, jamais très sage.

Pour l'instant, je ne comprends pas très bien l'orientation atlantiste de Sarkozy. Mon soupçon (méchant, évidemment) va dans le sens d'un simple amour du pouvoir. Si Sarkozy veut qu'on l'aime parce qu'il est puissant, c'est qu'en même temps il partage cet amour du pouvoir; ne pouvant séduire les Américains pour en faire des fidèles sarkozystes, il s'est laissé séduire (depuis longtemps, paraît-il) par la puissance américaine. Ou encore: il est d'emblée conquis. D'après Le Monde toujours, ce rapprochement avec les Etats-Unis va augmenter l'influence de la France dans des domaines importants : Moyen-Orient, Maghreb, Afrique. Je ne vois pas en quoi, car jusqu'à présent, le principal atout de la France a été d'être une alternative à l'hyperpuissance. Être un rouage de plus dans le système diplomatique américain, alors même qu'il est au plus bas, ce n'est pas forcément ce qu'il y a de plus efficace.

Le "style Sarkozy" en politique étrangère, au-delà des tapes dans le dos, de la vodka de Poutine que personne n'a bue, des bises pour Merkel et des bonnes bouilles un peu partout, est finalement - c'est qui n'est guère surprenant - tout à fait semblable à son style à usage interne. L'essentiel, c'est de plaire à tout le monde, de séduire tout le monde, d'avoir tout le monde dans son camp. Comme il l'a appris (on espère en tout cas) avec l'épisode libyen, ce n'est pas toujours si facile, tant les intérêts des uns et des autres sont divergents. Pour la politique franco-française, il est assez facile d'utiliser le pouvoir de sa position pour séduire : tout le monde (ou presque, il y a toujours des grincheux) veut être du côté du puissant vainqueur. En politique étrangère, en revanche, les interlocuteurs n'ont pas les mêmes besoins. Ainsi, le prix à payer pour séduire peut devenir exorbitant, comme avec Kadhafi, ou même avec Poutine, avec qui Sarkozy aurait assumé, toujours d'après cette journaliste du Monde, une position de faible.

Ainsi, avec Bush Jr., Sarkozy est en train de renoncer à tous les avantages, en termes d'image, de crédibilité, acquis par Chirac, de les vendre en somme afin de s'afficher comme pôte du puissant. J'espère pour lui que Sarkozy s'en sentira grandi. Ce rapprochement des vacanciers est certes moins dramatique que l'aventure libyenne, mais il suit en profondeur le même schéma. Je disais l'autre jour que l'essentiel était de savoir quel serait le "récit" libyen définitif : "Sarkozy l'énergique qui sauve les infirmières en faisant du business en même temps" contre "Sarkozy le médiatique qui s'achète un succès diplomatique au prix fort". Je voudrais en proposer une autre version encore. Dans des négociations avec un vendeur intransigeant, Sarkozy est celui qui se vante de l'avoir fait craquer. "Je sais faire, moi, vous allez voir." Après on apprend qu'il n'a fait que sortir son chéquier. Pour l'Europe, c'était pareil. Se payer l'image de celui qui a sauvé l'Union (du moins pour les téléspectateurs TF1) en donnant à chacun tout ce qu'il veut, ou presque, et en vidant le traité de son sens.

La diplomatie est un jeu sur le long terme. Le style de Sarkozy semble être au contraire de tout claquer tout de suite. On verra plus tard combien ça nous coûtera. L'essentiel est de se hisser au niveau des grands tout de suite. Après avoir fait son tour de bateau avec George W. Bush, l'un des présidents américains les plus impopulaires de l'histoire des Etats-Unis et auteur de l'un des échecs "diplomatiques" les plus éclatants dans l'histoire de l'état moderne, Sarkozy sera-t-il encore capable de s'opposer à une invasion de l'Iran, qu'une bonne partie des néo-conservateurs américains considèrent, contre toute vraisemblance, comme aussi nécessaire et justifié que leur invasion de l'Irak? Sarkozy n'a-t-il pas tiré de leçon de la chute de Tony Blair qui avait, aussi, voulu jouer dans le club des grands?

8 août 2007

Superhéros

Juste quand je venais de dire que si Sarkozy se fait parler de lui sur son bateau, c'était pour nous faire oublier la Libye, sachant que l'appareil médiatique ne peut penser qu'à une seule chose à la fois. Et si telle n'était pas son intention lorsqu'il engueulait les journalistes de l'AP, c'est en tout cas l'une des fonctions de ces vacances en général.

Cependant, je viens de tomber sur la version de l'incident de Rue89 qui est très instructive car elle contient la traduction des observations de l'un des deux journalistes. Voici sa conclusion:

Pouvez vous imaginer une situation similaire aux Etats-Unis?

Non, sûrement pas. Je ne sais pas si les hommes politiques américains sont plus malins que le Président Sarkozy, mais ils sont conscients des répercussions d'un tel acte... Je ne veux pas appeler ça une diatribe... Mais ils savent qu'une telle sortie colérique aurait un impact négatif sur eux. Je ne vois pas une telle chose se produire. Il n'est certes pas un nouveau venu en politique, je ne connais pas bien son histoire, mais on pourrait s'attendre à ce qu'il soit un peu plus conscient de ce qui va avec le fait d'être Président d'un pays important.

Oui, voilà la question. Pourquoi se laisser aller ainsi, torse nu devant des photographes, alors que l'on n'est pas n'importe qui, mais bien le président d'un grand pays, membre permanent à l'ONU, membre du G8, détenteur de l'arme nucléaire, etc.? Et comment penser qu'une telle histoire ne nuirait pas à son image?

Les choses se compliquent depuis que l'on signale la présence de Rachida Dati dans le bateau (via Plume de presse):

La présence de la Garde des Sceaux dans le bateau présidentiel est surprenante. Mais si elle explique l'énervement du Très Grand Homme (TGH), qui voudrait dissimuler (et pourquoi?) le fait que sa ministre ait rejoint la Famille Présidentielle (et pourquoi?), elle n'explique pas la réaction de Sarkozy. Si vraiment son intention était de continuer à cacher Dati, pourquoi aller ainsi à l'abordage, en provoquant l'incident et en risquant que l'on reconnaisse sa ministre ? N'importe quel autre chef d'Etat aurait envoyé ses gorilles pour le faire en douceur. Pourquoi vouloir, à ce point, tout faire soi-même, y compris le boulot de garde de corps?

Je ne pense pas que ce soit un pur coup de colère, un acte seulement impulsif, spontané et irréfléchi, mais une nouvelle manière de jouer son rôle de superhéros. Un superhéros est fort. Un superhéros n'envoie pas des militaires anonymes se bagarrer à sa place. Comme pour le culte du corps, l'exhibitionnisme permanent (jogging, swimming, torse nu), et ce même si les photos révèlent un peu de gras autour de la ceinture, il s'agit de faire revenir les projecteurs sur notre Action Man national. Loin la Libye compliquée, loin loin le service minimum, loin loin loin la franchise médical. Et le pire, c'est que, jusqu'à nouvel ordre, jusqu'à une démonstration définitive de l'inanité du concept, la France veut absolumment un superhéros. Je parie que la ligne superhéros va rejoindre celle de la religion d'Etat que le TGH vendait pendant sa campagne, et ainsi nous aurons droit à de véritables miracles.

7 août 2007

Cool! c'est les vacances

Dans son reportage sur l'utilisation sarkozÿen des médias, Le Monde récidive (ça fait combien de fois maintenant?) dans le genre critique molle qui dissimule (mal) une grande admiration. Cette fois c'est une Chronique par Isabelle Talès dont le titre pourrait donner le soupçon que l'on est enfin dans la mise en cause de la hypermédiatisation du méga-omni-hyper-président: "Nicolas Sarkozy, micro ouvert tout l'été". Le ton est léger, celui d'une vacancière fatiguée par toutes ces nouvelles. Mais finalement tout est très sympathique:

D'autant que l'air du New Hampshire semble réussir au chef de l'Etat. Interrogé sur l'affaire libyenne quand il était encore à Paris, il avait lâché deux mots et une grimace entre deux claquements de portière. Là, il redevient volubile, sourit, révèle le contenu de son iPod (Aznavour, Johnny...), pose avec des touristes américains, s'attarde avec les journalistes, puis leur demande une dernière fois de respecter son droit à la "tranquillité".

Mais, au fond, a-t-il vraiment envie d'être tranquille, lui ?

Le personnage joué par Sarkozy est en train de devenir celui d'un agité aimable, qui aime tellement travailler qu'il ne décroche pas vraiment pendant les vacances, alors que nous, les Français normaux, on n'a pas envie de penser à la politique du tout. Pas à Sarkozy, encore moins à l'affaire libyenne.

Et il ne faudrait même pas parler de ce regrettable (mais ô combien compréhensible, n'est-pas?) de cet incident où Sarkozy "perd son sang froid" avec des journalistes américains. Pas tranquil du tout, le TGH en fait. Mais comme tout est com' désormais, ce n'est peut-être pas si paranoïaque de penser que ces énervements ne sont pas une manière de passer à autre chose, de faire oublier Kadhafi en ramenant notre attention à la petite personne présidentielle elle-même, ou encore à sa famille.

6 août 2007

La Libye à la plage

En vacances, mon taux de bloggage est en baisse. En revanche, je ne côtoie pas tout à fait le même monde, et je suis surpris, et déçu, de voir que l'affaire "armes pour infirmières" ne choquent pas plus que cela. En fait, la ligne du Figaro, selon laquelle le fait de combiner la libération des ôtages et la vente d'armes à un dictateur, c'est tout simplement une bonne opération de tous points de vue, humanitaire et commercial. Le fait de mobiliser le Qatar pour avoir des liquidités tout de suite, c'est une preuve de savoir faire, c'est du business. Tout va bien.

L'argument selon lequel la France aurait payé très cher la libération des ôtages, ou encore, selon lequel la France aurait payé très cher l'opération médiatique de ce que Le Monde appelle "le couple exécutif", ces arguments-là ne semblent pas porter très loin. En tout cas, c'est la conclusion à laquelle je suis arrivé à partir des discussions que j'ai eues ces deux derniers jours. L'avis des plages.

Cependant, le signe principal, au cours des derniers jours, qu'il y a un souci, ce sont les efforts de l'Elysée, au-delà de l'invention d'une nouvelle forme de politico-paillettes bushophiles, pour établir le démenti.

Tout va dépendre du "récit" qui va sortir de cet épisode, celui du "c'est tout bénef' pour la France", ou celui de Sarkozy qui vide le compte de crédibilité politique de la France pour marquer des points pour sa gloire personnelle.

2 août 2007

Faiblesses de l'hyperouverture

Pendant la campagne présidentielle, toutes les interrogations sur la compétence portaient uniquement sur Madame Royal. La compétence à gouverner du Très Grand Homme (TGH) ne faisait pas l'ombre d'un doute. Pourtant, pendant le débat, c'était Sarkozy qui racontait des conneries sur l'entrée de la Turquie dans l'UE, tandis que Ségolène Royal présentait une position totalement en phase avec la véritable position diplomatique de la France.

Aujourd'hui, avec l'Affaire de la Contrepartie Libyenne, nous avons droit au spectacle d'un président, convaincu que sa bonne mine peut l'emporter dans n'importe quelle situation, qui se heurte à la réalité internationale. En condensé, la méthode Sarkozy ne fonctionne pas lorsque son interlocuteur n'a rien à foutre de l'opinion des téléspectateurs de TF1, ou a des intérêts de communication parfaitement opposés à ceux du TGH. Les ministres des finances de l'UE étaient très gentils à côté.

Ainsi, Saïf Al-Islam Kadhafi assure la communication auprès non seulement des Libyens, mais surtout auprès du reste du monde arabe, avec un message très simple : mon père les a eus. Il est évidemment suffisamment proche du pouvoir pour que l'on comprenne bien que ce n'est pas une petite fuite. Tiens, cette proximité avec le pouvoir, ça ne vous rappelle rien ? L'intervention de l'épouse du chef de l'Etat, par exemple?

Sarkozy ne peut pas proposer un poste de ministre à Kadhafi. Kadhafi ne fera pas partie de "l'ouverture". Il paraît qu'il n'a même pas sa carte à l'UMP. Kadhafi veut ses armes, il s'en fout des besoins de com' de celui avec qui il a fait son marché. D'autant plus qu'il lui suffit de dire la vérité. Au contraire de Sarkozy.

Pire encore pour le TGH, Bernard Kouchner, malgré sa soumission totale à l'ouverture, ne fait pas partie du petit cercle de personnes en qui Sarkozy a confiance. Il n'est pas au courant et il n'est pas content. Il ne joue pas le jeu en se laissant humilier, et oblige Sarkozy à s'enfermer définitivement dans le refus de toute contrepartie. Déjà personne n'y croit, et même Le Monde (j'allais dire Le Minc) est monté timidement sur ses chevaux de taille moyenne:

La "République irréprochable" que veut installer M. Sarkozy est prise en défaut de transparence, voire en flagrant délit de manipulation de l'opinion.

Double faiblesse du système Sarkozy. Faiblesse du côté de la kouchnerture, faiblesse surtout de l'omni-hyper-présidence. Ce n'est pas par hasard qu'il existe des hiérarchies diplomatiques. Le principe de toujours tout faire vite en y mettant un max d'énergie, c'est très cool, beaucoup plus cool que des lentes négociations qui n'ont pas l'air d'avancer. Encore une de ses fourmillères dans lesquelles il suffit de mettre un bon coup de pied. En l'occurence un coup de Nike. Le vieux système passait mal à la télé, était difficile à expliquer aux téléspectateurs. Mais il avait des avantages. Dont le moindre n'était pas la protection du chef d'Etat. Si une affaire tournait mal, on pouvait toujours virer un diplomate ou même le ministre. Mais Sarkozy n'installe que des fusibles grillés, car toute la lumière doit venir de lui. Jusqu'à ce que Kadhafi coupe le courant.

1 août 2007

Sarko et la Princesse de C. : les propos

Ce petit mot pour répondre à un commentaire aujourd'hui de filàplomb. Voici les citations concernant la question "Sarko et les lettres". On notera la conception assez large que Sarkozy se fait des lettres anciennes, qui, sans doute, incluent la littérature jusqu'en 1970 au moins. La Princesse de Clèves (1678) relève des lettres classiques? Après tout, quand le passé n'est qu'un immense trou noir d'ignorance, Cicéron n'est pas loin. Quand donc le président dit vouloir rendre payantes les études de littérature ancienne, on doit comprendre qu'il faudra payer pour étudier Céline ou Aragon...
"Vous avez le droit de faire de la littérature ancienne, mais le contribuable n'a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne. Les universités auront davantage d'argent pour créer des filières dans l'informatique, dans les sciences économiques".
Nicolas Sarkozy, 20 minutes, 19 avril 2007.
"Le contribuable n'a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1 000 étudiants pour deux postes. [...] Les universités auront davantage d'argent pour créer des filières dans l'informatique, dans les mathématiques, dans les sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable, mais l'Etat doit se préoccuper d'abord de la réussite professionnelle des jeunes."
Nicolas Sarkozy, 20 minutes, 16 avril 2007.
"Dans la fonction publique, il faut en finir avec la pression des concours et des examens. L'autre jour, je m'amusais, on s'amuse comme on peut, à regarder le programme du concours d'attaché d'administration. Un sadique ou un imbécile, choisissez, avait mis dans le programme d'interroger les concurrents sur La Princesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de La Princesse de Clèves... Imaginez un peu le spectacle ! En tout cas, je l’ai lu il y a tellement longtemps qu’il y a de fortes chances que j’aie raté l’examen !"
Nicolas Sarkozy en meeting à Lyon (23 février 2006). Discours publié par l'UMP. Pauvre guichetière et pauvres fonctionnaires! Le monde selon Sarkozy est divisé en deux: d'un côté le peuple (la guichetière confondue avec l'attaché territorial, pourquoi faire compliqué quand tout le monde préfère le simple?) et de l'autre le people. D'autre part, permettez-moi de douter de la véracité de l'anecdote. A ma connaissance, une question sur la Princesse de Clèves à un concours d'attaché ne peut relever que du détail (les lettres ne sont pas au programme) sinon de l'affabulation désinvolte du président.