12 décembre 2008

Des bons gestionnaires

7 décembre 2008

L'empereur nu dans ses vêtements trop grands, ou l'art d'agacer

"Je suis libre en tant que président de la République française de mon agenda".

Dans le contexte, il s'agit d'être "libre" vis-à-vis de la Chine. Laissons l'essentiel de côté, pour se focaliser sur la petite bête. C'est ainsi que l'on reconnaît l'anti-sarkozysme primaire.

"Je suis libre [...] de mon agenda." Je fais ce que je veux. Pas si libre que cela, puisque le Très Grand Homme (TGH) a mis assez longtemps à se décider s'entretenir avec le Dalaï Lama autrement que par Bruni-Sarkozy interposée. Mais non, oublions tout cela : "je suis libre en tant que président de la République française de mon agenda". Le petit garçon qui ne cesse d'affirmer qu'il est "grand", qu'il fait ce qu'il veut, que t'as pas le droit de dire qu'il ne peut pas avoir encore un bon bon, etc.

"... en tant que président de la République française..." On l'aurait oublié, ça ? Si seulement c'était quelque chose qu'on pouvait oublier de temps en temps. Le TGH doit constamment nous le rappeler, explicitement, en mettant les points sur les "i" : République française, et non République populaire de Chine par exemple, malgré son admiration pour les politiques salariales de cette autre république.

Pourtant, il y a autre chose qui cloche dans cette phrase. "Je suis libre en tant que président de la République française de mon agenda". C'est peut-être lui. Il a eu tort, il semblerait, d'avoir fait l'impasse sur le monastère Corse où il devait apprendre à habiter la fonction. Il "l'habite" comme un garçon (petit garçon) porte un vêtement trop grand. J'étais comme ça, moi, petit : soucieux d'être plus grand, voulant toujours la taille au-dessus comme si ça me rendrait plus grand. J'avais 8 ans. J'ai changé depuis.

Ce qui cloche, donc, c'est ce "je" qui est accessoirement Président de la R. Accessoirement, comme le Philippe Patek est un accessoire. Il n'a pas compris qu'être Président n'est pas une liberté mais une responsabilité, une contrainte. Pas parce qu'il y a beaucoup de boulot, mais parce que, en tant que monarque élu, il est censé incarner cette République. Ce n'est pas malin de laisser supposer sans cesse qu'il ne serait pas à la hauteur.

Sarkozy, s'il avait compris cette distinction, aurait pu éviter certaines erreurs qui lui avaient, à l'époque, coûté assez cher en termes de popularité : le yacht, les escapades un peu trop voyantes avec une ex-top model. Il pensait qu'être Président était simplement un boulot où l'on pouvait décider de son propre salaire, mais qu'il pouvait exister, en tant que personnalité publique, à côté de ce métier. Cette phrase que cloche montre qu'il n'a pas vraiment changé. Sauf qu'aujourd'hui, le système a un peu évolué. Le "personnage" sert à distraire. Vous n'êtes plus obligé d'aimer Sarkozy. Car pendant que ses manières vous énervent, vous ne regardez pas l'essentiel, c'est-à-dire les actions réelles qu'il entreprend. Hortefeux sévit discrètement ; Darcos et Pécresse cassent, pour toujours, l'enseignement et la recherche, et ainsi de suite. Les aiguilles dans la poupée ne changeront rien. C'est jouissif, mais cela distrait du politique.

Sarkozy sait profiter du fait qu'il nous agace. S'il n'hésite pas à se rendre ridicule, en faisant appel contre la poupée par exemple, c'est que même ce ridicule lui sert de bouclier communicationnel, pour nous faire parler de lui plutôt que de ce qu'il fait.

2 décembre 2008

C'est pourtant pour ton bien

Lefebvre :

"Cela a été dans beaucoup de rapports. On dit qu'il faut le faire dès l'âge de 3 ans pour être efficace", a déclaré M. Lefebvre sur Europe 1. "Je ne suis pas un spécialiste, donc je ne déterminerai pas à quel âge il faut le faire", mais "quand vous détectez chez un enfant très jeune, à la garderie, qu'il a un comportement violent, c'est le servir, c'est lui être utile que de mettre en place une politique de prévention tout de suite", a-t-il ajouté.

Je vais tenter de ne pas trop me moquer de Lefebvre, parce que c'est trop grave et trop triste. Mais quand même. "Cela a été dans beaucoup de rapports" : c'est donc vrai. "Je ne suis pas spécialiste" : on s'en doute. "...donc je ne déterminerai pas à quel âge il faut le faire" : ah ? ce n'est donc pas le porte-parole de l'UMP qui décide comment il faut élever les enfants ?

Et surtout : "...il faut le faire..." Faire quoi ? "...mettre en place une politique de prévention..." Une "politique de prévention" ? Le gamin turbulent à la garderie va donc se retrouver nez-à-nez avec une "politique de prévention", concocté par l'UMP en plus, une politique rien que pour lui. Oui, une politique : du grec Polis, "la cité".

Avec pour but d'exclure le môme de la Cité, en le mettant en tôle dès 12 ans. (C'est pour son bien, il remerciera Lefebvre à sa sortie de prison.) Ou encore de garder les "enfants difficiles" pour toujours dans leurs cités.

Donc une politique de prévention, sur mesure, pour l'enfant de trois ans. Et qu'on ne se trompe pas, c'est beaucoup plus bâton que carrotte, aimer bien en châtiant bien. Eh, gamin, c'est pour ton bien. La souffrance de l'enfant ne sera pas pris en compte, son comportement ne sera pas vu comme un symptôme. Non, à trois ans, le gamin va être déjà responsable. A trois ans. Une bonne paire de claques et puis mange ta soupe.

Finalement, trois ans, ce n'est pas grand'chose. Lefebvre veut aller déjà plus loin.

"Moi je souhaite qu'on aille même sans doute un peu plus loin", sur "la question de la détection précoce des comportements", a-t-il ajouté.

Se rapprocher encore plus de la naissance. Faut-il y voir une quête de la mère ? L'UMP qui cherche à retourner dans l'utérus, avec une compagnie de CRS cette fois ? Avec des tazers ? Avec une politique de prévention ?