Fin de campagne oblige, je ne vais pas pester contre l'un ou l'autre des candidats présidentiels. Peut-être grâce au cessez-le-feu, j'étais en train réfléchir au système social français, de manière un peu détachée. Je venais de lire ce papier dans The Economist qui parle du chef de la BCE, Mario Draghi, et le cocktail d'austérité et de croissance qu'il recommande pour l'Europe. J'ai lu aussi cet édito du Monde, où est exprimé le regret que la campagne présidentielle n'a pas permis d'engager le débat sur les vraies questions de mondialisation, de l'international en général. Ils n'ont pas tout à fait tort : la focalisation sur la personalité de Nicolas Sarkozy (focalisation souhaitée par l'intéressé) et sur la question de l'extrême droite et ses thèmes (souhaitée par le même candidat) ont en effet dominé la couverture médiatique, et par conséquent la réalité couverte.
Dans Ze Economist on lit ceci :
Instead Mr Draghi’s version of a growth compact would accomplish three things. First, he wants more progress with structural reforms, in product as well as labour markets, not least since enhancing competition between firms is often the precondition for greater labour flexibility. Second, he advocates more investment in infrastructure at the European level and backs a better mix of fiscal retrenchment, focused more on cutting current spending than on axing investment and raising taxes.
Si comprend bien, le growth compact devrait accompagner la Règle d'Or, pour complèter l'austérité par des mesures destinées à stimuler la croissance et améliorer la compétitivité des entreprises européennes. Ce qui m'a retenu, c'est la nécessité de "réformes structurelles" aussi bien dans le "marché des biens" que celui du travail. Au moins on admet que le droit du travail n'est pas l'unique obstacle au bonheur, et que les connivences et les monopoles nuisent autant à la productivité. C'est bien, même si évidemment Draghi n'est pas non plus un mélenchonien.
Je pense donc aux "réformes structurelles" et à ce marché du travail. Depuis cinq ans, le mot "réforme" me met automatiquement en état d'alerte. Mais réfléchissons quand même.
Voici en tout cas mon idée, ma proposition. J'imagine qu'elle a déjà était faite, mais tant pis, je fonce : le niveau de prélèvement sur le travail devrait être inversement proportionnel à la durée et à la stabilité de l'engagement. Tout emploi moins stable qu'un CDI aurait un taux de prélèvement supérieur. La logique étant qu'une entreprise qui embauche pour des courtes durées doit payer plus cher pour compenser la précarité qu'elle impose au salarié.
Si on pense réellement en termes d'assurance chômage, c'est évident que le risque de chômage est beaucoup plus élevé pour un salarié qui n'a qu'un CDD de quelques mois. L'assurance devrait logiquement coûter plus cher, et c'est, il me semble, approprié que ce soit l'entreprise qui supporte le coût du risque, puisque c'est elle qui bénéficie de la souplesse de l'engagement.
Autrement dit, la précarité devrait avoir un prix. Ou encore, du point de vue de l'entreprise : la souplesse deviendrait quelque chose qu'on achète, en même temps que le travail. Dans le système actuel, la précarité (ou la souplesse) ne coûte rien à l'employeur, à la différence de l'emploi stable ; c'est donc dans son intérêt d'augmenter la précarité à chaque occasion, avec pour conséquence les CDD à répétition avec leurs effets néfastes pour tout le monde, salarié et entreprise. Si l'entreprise compensait, en argent, la précarité (ou la souplesse), l'équation serait modfiée : quand la souplesse était essentielle (pour telle ou telle raison), l'employeur en aurait la possibilité, mais aurait intérêt à limiter de telles solutions. En faisant appel au travail précaire, l'entreprise participerait davantage à la solidarité nationale et à l'équilibre des comptes.
Et tout le monde serait content.
Enfin, voilà l'idée. J'aimerais entendre pourquoi c'est une mauvaise idée.
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