La droite a toujours eu un rapport émotionnel avec la dette. Des conservateurs, avec leur image de "bon père de famille", on était habitués à cette grande méfiance vis-à-vis de la dette. Le célèbre "les caisses sont vides" du malheureux François Fillon est dans la droite lignée de cette vieille logique. Les gauchistes sont irresponsables, ils dépensent les sous de nos petits enfants pour le donner à des fonctionnaires paresseux. Sur toute proposition sociale pesait le menace de la dette, ou encore le fameux "trou de la sécu" dans lequel on allait tomber un jour ou l'autre.
Ça, c'était la droite traditionnelle. Elle existe d'ailleurs encore. Je citais Fillon tout à l'heure, par exemple. C'est une droite rassurante, utile pour les inquiétudes des nantis qui, avant toute autre chose, ne veulent pas voir leur capital partir en fumée, dans les narines des mêmes fonctionnaires (toujours eux), ou même celles, encore plus gourmandes en fumée, des RMIstes.
À côté de cette bonne vieille droite, existe donc, avec Sarkozy, une droite des managers. On disait longtemps droite bling bling à propos de Sarkozy. C'est un peu la même chose : le bourgeois convservateur n'avait pas besoin de Rolex, ou s'il en avait une il la portait correctement sans ostentation, car sa richesse était de famille, ancienne, acquise, évidente. La richesse du manager, en revanche, doit être visible car elle est neuve. Le manager doit marquer le coup, comme tout bon nouveau riche. Surtout, sa richesse n'est pas structurée comme celle du bourgeois. Le manager vit dans le flux, peut-être même dans la dette, dette qui lui est permise parce qu'il ne fait aucun doute qu'il est déjà trop puissant (chef de rayon chez Carrefour, directeur d'agence chez BNP-Paribas, etc. etc.) pour être pauvre. La pèse du mois prochain sera inévitablement supérieure à celle de ce mois-ci. Pas de souci.
Bien sûr, ces deux droites se croisent et s'entrecroisent, s'aiment et se détestent. Elles partagent la conviction que le but de la politique est de supprimer les systèmes de partage, tant ils sont convaincus d'être en permanence les perdants dans les partages. Au-delà de ce socle idéologique, cependant, leurs analyses sont divergentes.
Le manager ne peut pas faire le dos rond. Il vit en flux tendu, au mois le mois. S'arrêter, c'est rendre la Rolex, la 535i. Le bourgeois n'aime pas voir baisser ses rentes, va même serrer la ceinture un peu pour protéger ses intérêts, mais il n'a pas peur. Il sait que lui et les siens se retrouvent toujours. Le manager a la trouille et applique les principes qui lui ont réussi jusque-là : foncer avec aplomb.
Dagrouik nous fait un topo sur les politiques d'endettement que la droite nous prépare. On savait déjà de quelle droite on avait affaire.
3 commentaires:
Il faudrait ressortir tous les discours des roquets sarkozyste qui durant la campagne, face à chacune des propositions de progrès social du PS et de sa candidate, opposaient horrifiés "la dette, la dette, la dette" comme un objet sacré, vaudou, dangereux. Mis en parallèle avec la situation actuelle, peut-être pourrions-nous désormais en rire !
:-)
En général, les gens qui détestent la répartition sociale sont ceux qui ont des amis richement dotés…
Oui, voilà, la dette était traditionnellement une sorte d'arme rhétorique pour écraser toute proposition sociale. Mais le pire c'est que, une fois l'orage passée, ils vont recommencer, et encore plus fort.
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