La dernière fois je parlais du fret et de sa place dans une économie dynamique et décentralisée qui est l'un des objectifs de ma campagne présidentielle « Les énergies de la France ». Mes contradicteurs, des fervents sarkozystes (ça doit exister) ou même des fervents borloosiens (ça doit exister), diraient : mais le Très Grand Homme (TGH) a déjà relancé le fret lors du Grenelle, alors rentre dans tes 35 heures, espèce de gauchiste.
En effet, la relance du fret, et même celle du fret fluvial, étaient prévues lors du Grenelle. Et pourtant, typiquement, rien n'a été fait :
Dans les autres domaines, le gouvernement a aussi multiplié les coups de canif. Dans le domaine de l'énergie, les outils mis en place pour remplir les objectifs fixés sont déficients. Le nombre de projets d'éoliennes a par exemple chuté de 60 % au premier trimestre 2010 par rapport à l'an dernier, en raison notamment d'un durcissement de la réglementation et des conditions d'implantation des champs. Dans les transports, le fret ferroviaire aurait dû représenter cette année 17,5 % du fret global. En réalité, il s'effondre à 12 %, après avoir été de 14 % en 2006, à cause des incitations au transport routier qui se poursuivent.
(En passant, j'implore le futur candidat PS de ne pas oublier de citer tous ces échecs, en utilisant le mot échec. Mais ce sera le sujet d'autres billets.)
Sur le papier, pourtant, les intentions du Grenelle 1 paraissaient assez bonnes (Lire les engagements ici.) Vu de l'extérieur, la clé semble être le développement d'un nouveau type de PME, les OFP, « opérateurs ferroviaires de proximité ». Pourtant, la vie n'est pas simple pour eux :
Seulement en France, la route des OFP est semée d'embuches : l'adaptation technique du réseau ferré et l'étau réglementaire qui verrouille le trafic ferroviaire de marchandises limite les possibilités d'organisation des flux par des opérateurs autres que la SNCF. L'obtention et le tarif des sillons (les droits de circuler) auprès de Réseau ferré de France (RFF), gestionnaire des infrastructures et des voies n'est pas une mince affaire.
Du côté de la SNCF, c'est compliqué aussi, hormis une résistance naturelle à voir des concurrents de petite taille venir les embêter. Le plan Fret annonce une réorganisation du fret et l'abandon du « wagon isolé » :
Ils estiment aussi que le plan Fret SNCF, annoncé en septembre 2009, "consacre l'abandon du wagon isolé (assemblage de wagons de clients différents) et créé des situations d'irréversibilité". "Toute la partie ouest du pays est désertée par Fret SNCF; la part modale du ferroviaire poursuit son recul; la taxe camion se fait attendre et fait l'objet d'intention d'utilisation pour les infrastructures routières et les pressions pour généraliser les camions de 44 tonnes et expérimenter ceux de 25 mètres de long pour 60 tonnes persistent", déplorent syndicats, écologistes et usagers.
En somme, on espère vainement l'arrivée de PME un peu suicidaires pour résoudre le problème ; la SNCF traîne vaguement des pieds, entre volonté de protéger ses terres et de faire des économies, et finalement on ne voit pas d'autre solution que de taxer les camions. Au risque d'avoir l'air pas tout à fait gauchiste, il est clair sans une révolution dans l'organisation du fret, dans le sens de la souplesse et la légèreté, une taxe camion ne servira pas à grand'chose. L'échec de Sarkozy sur ce dossier est culturel et idéologique. Sarkozy est censé représenter le volontarisme (tout devient possible ?), mais ici c'est justement la volonté qui manque. Surtout, et c'est là ce qui en fait un échec de droite, ce qui manque est l'esprit de coopération nécessaire pour faire avancer l'ensemble de acteurs concernés : cheminots, entreprises publiques et privées, régions, Europe, etc. Autrement dit : pour réussir le fret, il faudra être beaucoup plus ambitieux.
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