La Ve République, et à plus forte raison sa version post-septennat, et encore plus la version peoplisée, focalise toute notre et notre énergie sur une seule élection pour choisir un seul bonhomme. Les coalitions sont impossibles. On est censés se reconnaître en la personne de l'homme providentiel que nous choisissons parmi les dix hommes (et femmes) providentiel(le)s. Le système favorise les manipulations et les brouillages entre personalité, image et politique. Mais c'est comme ça. J'en ai parlé l'autre jour.
La tentation, donc, pour le vrais gauchistes, est de profiter de l'occasion pour s'exprimer, dire que les réalités sur lesquelles est fondé le discours politique qui passe pour "raisonnable" déforment les représentations, limitent nos options, tuent la politique. Moi-même je ne suis pas insensible à ces analyses, surtout pour leur dimension critique. C'est comme le marxisme : il reste un excellent instrument de diagnostic, mais un horrible instrument pour réparer les torts qu'il identifie si bien.
Le problème c'est que, en dépit de tous les beaux principes démocratiques (et surtout individualistes, voire romantiques), si vous utilisez votre vote dimanche pour vous exprimer, vous allez le gaspiller, voire renforcer votre ennemi.
- C'est irresponsable de penser que de toute façon Hollande va gagner au second tour. Vous laissez les autres faire le travail, en vous contentant de vous exprimer. Que ferez-vous si les sondages n'existaient pas ?
- En admettant qu'il accède au second tour, le score de François Hollande au premier compte beaucoup. Un Sarkozy affaibli par un mauvais score au premier tour sera pendant les quinze jours à venir d'autant plus vulnérable, plus désespéré, d'autant moins épaulé par ses fidèles camarades.
- Dire Hollande/Sarkozy, même combat, c'est oublier tout ce qui s'est passé depuis cinq ans, c'est oublier que Sarkozy a gravement perverti le fonctionnement de notre démocratie, qui avait déjà ses problèmes avant qu'il s'en mêle. Sa réélection validerait son comportement pendant le premier mandat et ouvrira la porte à des nouvelles dégradations pendant le second.
- Pour peser à gauche, pensez plutôt aux législatives. Je sais que ce n'est génial, mais c'est aux législatives que les pourcentages de la composition du vote à gauche à un véritable sens.
Dimanche, avec votre vote, posez-vous la question : quel choix va faire le plus de bien à toutes les personnes réelles qui sont affectées par la conduite de la politique du pays ?
2 commentaires:
Il m'a fait plaisir, ce billet !
Tant mieux Juan. Courage pour la suite.
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