L'autre jour, avant le début de la grève, je disais :
Finalement, arriver aux mêmes "réformes" sans une "putain grosse grève", comme dirait CSP, ça ne les [Sarkozy et la droite] intéresse pas. Car il faut, à cette droite, pour des raisons obscures mais liées à des traumatismes dans la petite enfance, écraser son adversaire.
Il fallait, à Sarkozy, à Fillon, à Xavier B., réussier à mater une grève pour effacer la honte de 1995, celle du CPE, et toutes les autres. Tout était dans le symbolisme. Une grève brisée aurait permis de signifier le triomphe du sarkozysme. Cette victoire hautement symbolique aurait eu pour effet de rendre inéluctables toutes les réformes suivantes, comme le dit Annick Coupé chez Politis:
Si la remise en cause de ces régimes se fait au pas de charge, ce n’est pas pour garantir l’équilibre financier du système de retraite, c’est, avant tout, pour préparer la suite. Aller vite pour casser les régimes spéciaux, démobiliser les salariés de ces secteurs qui ont encore des capacités importantes de mobilisation, c’est préparer le rendez-vous de 2008 : allonger à nouveau la durée de cotisations de tous les salariés (privé et public) à 41 ou 42 annuités, voire plus. Il s’agit bien de travailler plus (le nombre d’annuités) pour gagner moins (baisse du niveau des pensions).
Une grève brisée dans l'opinion, c'était le démarrage du rouleau compresseur "réformiste".
La stratégie consistait à jouer sur la confusion entre un plan symbolique et un plan très pratique. Côté symbolique, les syndicats des cheminots ont un rôle très particulier en France, où le taux de syndicalisme est assez bas, mais où le pouvoir politique des syndicats est très élévé. D'une certaine façon, et tout le monde le sait, quand ces catégories de fonctionnaires font la grève, ils le font un peu pour tout le monde, même pour ces pauvres usagers qui servent de chair à reportage. (Il y en a quand même marre d'entendre toujours pareil, mais combien de fois : "eh, moi, j'sais pas, s'il fait beau je vais marcher jusqu'au boulot, ça fait 4 km...") Côté pratique, il y a les emmerdements très réels provoqués par les grèves, et il y a toute la complexité des retraites, que la plupart des gens ne comprennent pas ou peu. Le rôle symbolique de la grève des cheminots ne peut pas être dit (ça ne doit pas être politique), et pourtant il est d'une très grande importance pour toutes les parties concernées (je ne parle pas du PS, là, évidemment). Le seul débat possible est celui qui concerne les détails : "décote" contre "je vais me lever à 3 heures du mat pour aller au boulot". Pas facile, dans ces conditions, de dire que les cheminots défendaient les intérêts de tous, alors qu'il est si facile de répliquer qu'ils ne défendent que leurs 37 annuités. Qu'en somme, c'est des feignants. Dommage qu'on ne peut pas leur appliquer des tests ADN quelconques, juste pour leur montrer.
Qu'est-ce qui s'est passé, alors? J'ai l'impression qu'aujourd'hui, cette grève ne pourra plus être brisée, au sens où l'espéraient les sarkozystes et les autres frustrés de la droite. Juan disait, après l'annonce que Sarkozy acceptait des négociations tripartes avec la CGT :
Sarkozy s'impatiente. La grève, sans être populaire, n'est pas franchement impopulaire non plus
Même si elle s'arrête demain, tout est chiraquisé, tout est redevenu compliqué. Il n'y aura pas de victoire franche capable de symboliser la défaite définitive du syndicalisme français. Quelle que soit l'issue réelle de ce conflit, et même si Sarkozy finit par être victorieux d'une certaine façon (ce qui n'est plus évident), ce sera une victoire embourbée qui ouvrira la porte à d'autres embourbements.
Alors, quoi : je souhaiterais l'embourbement de la "réforme" simplement pour nuire au pouvoir politique du président? En un mot, oui. Car même si je pense, mais en réalité c'est un autre sujet, qu'il y a des modifications à faire dans le modèle social français, je ne veux pas que ce soit Sarkozy, Fillon et Xavier B. qui les fassent.
(Update: je donne à ce billet mon premier flag "ducon"!)
7 commentaires:
Vous avez le droit de prendre vos désirs pour des réalités et de les exprimer. Mais il faut souhaiter que vos amis n'auront pas l'occasion de mettre leurs méthodes à exécution, car la démocratie qui consiste à faire taire et à éliminer ceux qui expriment des opinions différentes, ça porte un nom : le totalitarisme et la censure est son bras armé.
Alors ça peut vous déplaire puisque vous pensez détenir seul la vérité mais les mots sont têtus et les amis que vous défendez sur mon site sont des fachos !
Comment vous y allez!
Les Vigilants suppriment votre fil RSS sur leur blog et c'est tout de suite le totalitarisme et le fascisme.
Je voulais dire tout simplement qu'il n'y avait pas censure, parce que personne ne vous empêche de vous exprimer.
L'idée est ici bien étalée, le gouvernement ayant cherché le ras le bol populaire pour asseoir une victoire qui, avec le temps, devient moins évidente.
Nous organisons la riposte face au déni de démocratie que représente la ratification, en plus sans débat, d'un Traité européen, faussement qualifié de "mini", à propos duquel tous les juristes s'accordent pour dire qu'il reprend dans son intégralité la Constitution massivement rejetée par référendum en 2005. Cher ami administrateur de ce site, n'hésitez d'ailleurs pas à parler de cette initiative à vos lecteurs et à aider à sa diffusion !
Nous avons mis au point un petit argumentaire pour mobiliser l'opinion, l'informer. Il est à diffuser MASSIVEMENT.
====> Le diaporama à diffuser est ICI : http://test.antemia.eu/html/16/File/referendum.pdf
Copiez-le sur votre ordi pour ensuite le diffuser par mail en pièce-jointe, ou diffusez directement le lien ci-dessus.
Participez ainsi à la "CHAINE du REFERENDUM" : chacun envoie à au moins 10 de ses connaissances ce diaporama (petit fichier pas lourd qui s'ouvre donc facilement). Tout peut aller très vite, on peut toucher beaucoup beaucoup de monde et changer la donne.
Plusieurs milliers d'internautes sont déjà dans la chaîne !
Mobilisons-nous contre la pire et la plus violente atteinte à la démocratie de la Vè République. Ne laissons pas tomber la souveraineté populaire, c'est trop grave !
Et ne comptons pas sur une presse servile pour faire naître le débat ou même seulement dire la vérité aux Français.
====> Le diaporama à diffuser est ICI : http://test.antemia.eu/html/16/File/referendum.pdf
Candide n'est pas candide, rien que pour ce mensonge il est à blâmer !
Homer,
Oui. On pensait que Sarkozy et les siens étaient une équipe imbattable en communication, et on constate qu'ils sont bcp moins effrayants.
le vrai,
J'étais pour le TCE, j'ai un peu de mal à m'opposer au "mini-traité", même si j'étais d'accord avec Ségolène Royal pour relancer un réferendum.
harpo,
Candide s'en remettra, j'en suis sûr.
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