(NB: ce billet a été écrit il y a deux jours.)
Que faut-il penser du désormais célèbre coup de fil de Séglène Royal à François Bayrou, que finalement tous les chefs de parti dénoncent, Hollande comme Bayrou ? Bourde de "Ségo la gaffeuse", image que certains n'hésiteront pas à nous resservir, ou bien manoeuvre astucieuse, qui concerne autant les législatives que la guerre du PS qui aura lieu ?
François-Mitterrand-2007 n'est plus là pour nous donner sa version de cette tactique. C'est dommage, car j'ai l'impression qu'il aurait su l'apprécier. Voici ce que j'y vois. Bien sûr, nous ne saurons que dans quelques mois comment ce geste téléphonique se jouera au PS, au MoDem, à gauche en général.
- Royal se pose en figure majeure du PS, se donne une envergure à nouveau présidentielle. Celle qui s'oppose véritablement à Sarkozy, tandis que les autres acceptent la défaite et se préparent à la bagarre intestine. Le Monde daté d'aujourd'hui parle d'un PS à deux têtes; DSK se trouve obligé de rester dans la lecture hollandienne de la stratégie.
- Royal crée une nouvelle pression sur le MoDem, moins sur Bayrou que sur ses cadres, qui voient qu'il y a tout de même un peu de "soupe" à obtenir à gauche, et que la stratégie du "ni-ni" permanent risque de s'avérer nihiliste. Je ne connais pas assez bien les dynamiques internes du MoDem pour savoir à quel point ses nouvelles structures sont prêtes à tout sacrifier pour l'ambition présidentielle de son fondateur.
- Royal devient, ou reste, celle qui "fait bouger les choses", qui n'accepte pas la défaite prévue sans au moins tenter quelque chose de nouveau. Même si ce "nouveau" n'est qu'une façon de rejouer l'entre-deux-tours, dans une situation qui devrait être plus favorable au PS. Ses concurrents apparaissent comme préférant perdre des sièges plutôt que de remettre en cause les "principes" (comme le dit Hollande) qui ont si bien servi au PS jusqu'à présent.
- Enfin, Royal montre qu'elle est prête à effectuer des changements assez importants, si elle devait être la prochaine Première Secretaire du PS. C'est là qu'il y a peut-être une faiblesse dans la stratégie (ou la tactique) ségoléniste, car on ne sait pas encore ce qu'elle proposera sur le plan idéologique, hormis un rapprochement purement stratégique avec la gauche du centre. Si j'ai une critique à énoncer sur la campagne présidentielle de Ségolène, elle concernerait ce point : la pensée de ce qui pourrait être cette nouvelle gauche ne s'est pas assez développée. Le chévenementisme et l'exploration des discours sécuritaires, pas plus que l'alliance avec le centre ne suffisent pas à fonder une nouvelle idéologie. L'idée d'y arriver en créant des espaces de dialogue (Désirs d'avenir, la démocratie parcipitative, le "débat" avec Bayrou) était séduisante, et a des vrais mérites, mais ne pouvait pas résister à l'apparence de solidité du programme de notre Très Grand Homme (TGH).
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