Au Bourget, François Hollande disait ceci :
Mais avant d'évoquer mon projet, je vais vous confier une chose. Dans
cette bataille qui s'engage, je vais vous dire qui est mon adversaire,
mon véritable adversaire. Il n'a pas de nom, pas de visage, pas de
parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera donc pas
élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c'est le monde de la
finance. Sous nos yeux, en vingt ans, la finance a pris le contrôle de
l'économie, de la société et même de nos vies.
[…]
Si la finance est l'adversaire, alors il faut l'affronter avec nos
moyens et d'abord chez nous, sans faiblesse mais sans irréalisme, en
pensant que ce sera un long combat, une dure épreuve mais que nous
devrons montrer nos armes.
Ce billet n'a pas pour but de dire le trop facile "il a dit ça pour se
faire élire, et maintenant il n'ose plus rien face à la finance".
Ce n'est pas comme si c'était facile, de terrasser "la finance". Les
constats sur les dangers, les dégâts et les dérapages d'un système qui
paraît bien hors de contrôle. (Lisez ce billet de Dagrouik, par
exemple.) Non seulement le problème
-
est complexe ;
-
est international et
-
concerne les entités parmi les plus puissantes de planète,
mais la dette, tout ce réseau des dettes entrecroisées et circulaires,
est partout, du voisin qui paie 450 € par mois pour pouvoir rouler en
Audi TT, jusqu'aux États qui dépendent d'un influx constant de
nouveaux crédits. Nous avons beau être contre la finance, contre la
dette, contre les banques et les banksters, contre Merkel, contre
Greenspan, contre Citigroup, contre Goldman Sachs, contre Moody's, il
reste le fait incontournable que le moindre ralentissement, même de
quelques semaines, de notre perfusion aurait des conséquences
catastrophiques. Et pas seulement la France : l'ensemble des pays dit
"développés" sont dans à peu près la même situation.
Personne n'aurait jamais planifier cette situation, personne n'aurait
souhaité en arriver là, y compris les banques elles-mêmes, mais un
ensemble de décisions, prises une par une depuis des décennies sont
responsables. À chaque pas de cette longue marche vers le précipice,
les décideurs (banques, parléments, chefs d'états) ont sûrement cru
tirer vers eux ; certains ont saisi des occasions pour accéder à des
nouvelles formes de rapacité.
Et aujourd'hui, les cris d'alarme, les constats semblent
inutiles. Oui, des erreurs commises il y a quarante, trente, vingt ans
ont conduit à d'autres erreurs plus récentes. Dans la tragédie, ce
qu'il y a de vraiment tragique, c'est que tout le monde sait que tout
va s'empirer, que la spirale est lancée, mais personne n'est capable
d'agir pour échapper à l'inévitable.
Car concrètement, je ne vois pas d'où pourrait venir même le début
d'une solution. Le programme de Roosevelt 2012 est sans doute ce qui
s'en rapproche le plus, mais, comme j'ai essayé d'expliquer dans un
autre billet, il est lui-même trop optimiste, et de toute façon
dépendrait d'un consensus international qui reste très loin des
attitudes actuelles. Bien sûr, le jeu en vaut la chandelle ; il ne
faudrait pas abandonner l'initiative pour autant, puisque la tentative
elle-même peut avoir une influence, à terme, sur ces mêmes attitudes.