Dans le Figaro de ce matin -- qui reste 10 centimes moins cher que Libé et 20 centimes moins cher que Le Monde -- on trouve ceci, une analyse qui va sans doute devenir la ligne interprétative la plus courante de ce premier tour des législatives:
La déroute de la gauche à ce premier tour des législatives éclaire d'un nouveau jour le scrutin présidentiel. Forte des 47% de suffrages exprimés qui s'étaient portés sur son nom le 6 mai, Ségolène Royal s'est refusée à parler de "défaite". Ses proches ont expliqué que les dix-sept millions de voix alors recueillies étaient annonciateurs de succès futurs. La victoire écrasante de la droite qui se profile désormais à l'Assemblée nationale dément un tel optimisme. La candidate socialiste était simplement parvenue à coaliser en sa faveur diverses oppositions au candidat de l'UMP -- de l'extrême gauche au centre -- sans qu'il s'agisse d'un cocktail électoral stable. La France avait franchement voté à droite le 22 avril comme le 6 mai. Elle confirme aujourd'hui spectaculairement ce choix.
Si je comprends bien ce qu'écrit ici Eric Dupin, l'UMP serait plus populaire que Nicolas Sarkozy, puisque les 47% de Ségolène Royal ne s'expliqueraient que par l'animosité de certains à l'égard du Très Grand Nicolas (TGN). Lorsque les Français ont la possibilité de voter directement pour l'UMP sans passer par la case Sarkozy, ils sont encore plus à droite. La France aime son UMP!
Il y a pourtant de bonnes raisons de ne pas souscrire à cette analyse. Tout d'abord, l'abstention : les Français ont compris que l'Assemblée Nationale ne sert plus à rien, et qu'il servait encore moins d'aller voter dans une élection décidée d'avance. Le PS fait un meilleur score que Royal au premier tour de la présidentielle (25.87%), mais la relative neutralisation de Bayrou et le MoDem hier y est sans doute pour beaucoup. Il me semble étrange de lire dans ce résultat une sorte de désaveu de Ségolène Royal (qui n'était pourtant pas candidate!). Le total des forces non-UMP (c'est-à-dire incluant le MoDem) hier s'élèvait aussi à 47%, comme si la ligne de partage n'avait pas bougé du tout. Bref, Ségolène ou non, la ligne bleue s'arrête à 47%. Juan chez Sarkofrance a raison de parler d'une "vaguelette bleue" (désolé, pas de lien précis). La nature du scrutin efface cette réalité, et je n'ai toujours pas vu ce chiffre, 47%, cité dans les médias (mais je suis un peu déconnecté du web en ce moment, alors j'ai pu le manquer).
La logique institutionnelle de cette élection quinquennatisée est aussi un facteur important. Pourquoi, en effet, voter une cohabitation pour un président fraîchement élu ? Du coup, l'opposition ne peut pas proposer de programme : pour quoi faire ? L'opposition condamnée à l'inaction totale, n'a pas à proposer, et par conséquent, apparaît comme une force purement négative. Il ne faudrait pas, sans doute, se laisser aller à ce fatalisme institutionnel, réagir, d'une quelconque manière. Le PS n'était pas, n'est pas, en position de réagir ainsi, tant que les rivalités continuent à être si déchirantes. Il est assez étonnant que le parti fasse un score qui serait parfaitement respectable si les autres participant à feu la Gauche Plurielle existaient encore.
Il faut admettre que Nicolas Sarkozy a très bien joué l'entre-deux élections. Hier soir, je n'en pouvais plus d'entendre les représentants de l'UMP se féliciter de son gouvernement d'ouverture, la kouchnerture du gouvernement. C'est typique du comportement du Très Grand Homme : une fois élu, il cherche aussitôt à obtenir encore plus.
Bref, tout va super bien.
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