12 juillet 2007

Comment réagir face à l'« ouverture »?

Nicolas Sarkozy est sûrement au maximum de ses capacités quand il s'agit de la lutte. Moi contre toi. A la mort. Comme avec Villepin. Je pense à cet épisode que raconte Guy Birenbaum, Sarkozy en train de raconter ses relations avec Villepin :

Nicolas Sarkozy, qui se mit alors à me mimer la scène, se montra en tout cas explicite au sujet du rôle qu'il prêtait dans l'affaire à son successeur au ministère de l'Intérieur : "J'ai pris Villepin comme ça [par le col] et je lui ai mis le nez dans sa merde. Comme ça !" me lança-t-il, brutalement. Presque comme s'il l'avait vraiment fait. Le tout était accompagné d'un drôle de rictus qui me laissa penser que cette véritable guerre irait finalement jusqu'au sang entre ces deux hommes.

Je pense aussi à ce moment un peu étrange lors de l'entretien/publi-info à l'Elysée, sur TF1, quand PPDA interroge le Très Grand Homme (TGH) sur sa politique de l'ouverture, et dit, d'un air très complice, quelque chose comme « ça ne plaît pas beaucoup aux socialistes ». Le regard de Sarkozy s'assombrit, il lève les yeux au loin et répond : « ce n'est pas à moi de leur rendre la vie facile ». Il cesse d'être le « président de tous les français » pour ne plus être que l'adversaire des socialistes. Jusqu'à leur destruction. Enfin, j'exagère un petit peu peut-être, mais c'est quand même à peu près ça.

Tout le monde, y compris Jack Lang, sait bien qu'il veut « asphyxier la gauche ». Il l'a dit. C'est pour cela que c'est en effet énervant d'entendre Manuel Valls dire:

Je me réjouis qu'il y ait un président actif et omniprésent. Ce qui ne signifie pas, évidemment, accaparement de tous les pouvoirs.

Ou encore :

Au-delà des craintes que sa démarche [à NS] peut susciter, je veux prendre cela comme une invitation à l'initiative

Ou encore pire, mais là c'est Jack Lang:

Mais sur la forme, il faut bien reconnaître que Nicolas Sarkozy dirige le pays avec un sens aigu de l'action au service d'une idéologie qui n'est pas la mienne. On va dire que c'est de l'hyperprésidentialisme. Oui, et alors ? On redécouvre une réalité en France : le président concentre tous les pouvoirs. La logique ne serait-elle pas d'instaurer un véritable régime présidentiel : un pouvoir exécutif contrôlé par un vrai Parlement, doté de réels pouvoirs. Puisque Nicolas Sarkozy dit qu'il a le sens de l'audace, alors, qu'il nous surprenne et qu'il propose une démocratisation profonde du système !

Entre l'apaisement et l'acceptation de l'hyperprésident, d'un côté, et crier au scandale, façon Hollande, de l'autre, ce n'est pas évident. Je suis néanmoins de ceux qui trouvent que cette nouvelle ouverture, notamment le FMI pour DSK, est l'occasion de faire table rase de cette génération d'éléphants. Il ne reste plus que l'ex-couple Hollande-Royal, le papa et la maman du PS. Et le Canard de cette semaine nous informe que si Hollande réussit à perdre quelques kilos pour l'université PS, c'est qu'il se prépare à être candidat lui-même en 2012. Ça lui laisse du temps pour faire du jogging en attendant. Enfin une façon concrète de procéder à la rénovation.

Je disais, donc, qu'entre l'apaisement, qui revient à oublier que Sarkozy veut asphyxier la gauche, et qui, pire encore, a pour effet de l'innocenter tout à fait (« le président de tous les français, grand rassembleur, etc. »), et crier au scandale, ce n'est pas si évident. Ne pas voir les tentatives de débauchage comme une violence faite au PS, c'est naïf à tel point que l'on doit soupçonner tout ceux qui épouse cette voie de chercher à se faire confier des miettes de pouvoir par le TGH. On ne devrait pas avoir à le dire.

Il y a un risque semblable, cependant, à crier trop fort au scandale. Chaque fois que la presse aborde la question, nous entendons systématiquement que le PS est très déstabilisé, que c'est dur pour eux de voir les camarades partir à l'UMP comme ça, etc. En général, c'est mon impression en tout cas, ces lamentations ne sont pas des citations, mais des intuitions des journalistes. Idem pour la question complice de PPDA que j'ai mentionnée plus haut. Le mot du jour, c'est que les socialistes sont à terre avec cette histoire. Voilà pourquoi il ne faut pas crier (trop) au scandale. Crier au scandale ne fait que renforcer les dégâts, en les validant. Il n'y a aucune autorité morale supérieure qui va intervenir pour redresser les torts que Sarkozy fait au PS. Le bon peuple, dans la mesure où il suit ces développements, les suit pour voir qui gagne et qui perd. Le Tour de France, en somme, mais avec des quinquagenaires. Le PS n'a rien à gagner en se montrant la victime, et plutôt tout à perdre. En se victimisant, il valide l'efficacité des coups portés contre lui.

En revanche, il est essentiel que tout le monde comprenne que ceux qui partent à la soupe chez Sarkozy le font à leur dépens, que le PS ne les suit pas, qu'ils cessent de représenter le PS, que c'est pas bien, pas bien du tout, etc. Il est essentiel de dénoncer la substance de l'ouverture. Ce sont des personnes qui partent à la droite, sûrement par intérêt personnel, ce n'est pas toute la gauche ou tout le PS.

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