Sur Betapolitique, on trouve un autre article intéressant qui posent quelques questions intéressantes sur la stratégie dite "d'ouverture" du Président Sarkozy. Sur le fond, l'auteur, Christian Sautter, rejoint un peu ce que je disais l'autre jour à propos de l'entrée qui maintenant paraît certaine de Bernard Kouchner au gouvernement.
Là où cela devient intéressant, c'est dans la réflexion sur le rôle du gouvernement que cela implique.
Il est pour le moins étrange, dans une démocratie parlementaire, de constituer son gouvernement en picorant sur tous les bancs de l’Assemblée. Les gouvernements d’union nationale sont l’exception dans notre pays et ne surgissent que dans les périodes de conflit mondial. Personne ne croit que flatter l’ambitieuse faiblesse d’une éminence du Parti socialiste amènera celui-ci à soutenir les projets du Président. Je vois donc, dans cette communication bien orchestrée sur le recrutement de ministres de gauche, soit une opération de désinformation, qui se dissipera d’ici à fin de la semaine avec l’annonce du nouveau gouvernement, soit l’aveu que le gouvernement n’aura pas grande importance dans la nouvelle direction de notre pays.
Ainsi, pour quelqu'un comme Kouchner, mais aussi, finalement, tous les membres du gouvernment Fillon, y compris ce dernier, d'ailleurs, la question de la légitimité électorale ne se posera pas, ou peu, car la marge de manoeuvre politique sera très limitée.
Christian Sautter évoque également la création du futur Conseil National de Sécurité qui serait, selon le Figaro :
UNE VRAIE structure pour conseiller le président de la République sur les questions diplomatiques et de sécurité, un peu comme à la Maison-Blanche, avec le National Security Council (NSC). Cela fait des années que l'idée de créer à l'Élysée un Conseil national de sécurité se promène dans les cerveaux, à droite comme à gauche d'ailleurs. Mais cette fois-ci, l'affaire semble sérieuse. Nicolas Sarkozy l'a annoncé comme candidat. Et il semble que le nouveau chef de l'État soit décidé à créer ce « NSC à la française », outil collant bien avec sa philosophie de l'exercice du pouvoir présidentiel.L'idée est apparamment de réorganiser des renseignements intérieurs, en créant
une Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) coiffant, RG, DST et SDAT, devrait donc voir le jour. Tout serait réorganisé en fonction des missions : antiterrorisme, contre-ingérence, intelligence économique, suivi des phénomènes sociaux et de quartier... (Figaro )mais aussi de tout chapeauter avec une coordination des divers services tournés vers l'étranger : armées, renseignements, diplomatie.
Bref, Sarkozy semble déterminé de maintenir ses habitudes sécuritaires acquises pendant ses années à l'Intérieur, comme par exemple son équipe de sécurité renforcée, même au risque de fâcher la Gendarmerie, et de se créer des accès comparables aux ministères de la Défense et des Affaires Etrangères, lui donnant, effectivement, la possiblité de court-circuiter les ministres concernés, et surtout un accès très direct aux différents services de renseignements.
A cela, il faut ajouter son traitement de l'UMP. Les fidèles s'énvervent de ne pas avoir leur part de soupe, et le Président ne veut pas que l'UMP ait un chef unique. Rali écrit à ce sujet :
Et comme dans les dictatures africaines, il refuse de laisser la présidence du parti unique de la droite, l’UMP, à un individu. Il souhaite qu’il y ait une direction collégiale avec des caniches (sic) qui obéiront au doigt et à l’oeil au président des français. Aurait-il peur de l’émergence d’un renouveau à l’UMP? de l’émergence de sang neuf ?Comme pour la protection rapprochée, cette mesure paraît légèrement paranoïaque. En tout cas Sarkozy agit très vite pour assembler un système de pouvoir centré autour de lui, quitte à prendre le prérogatives des autres branches de l'Etat s'il le faut.
La stratégie Kouchner est bien sûr censée renforcer l'UMP pour les législatives, en supprimant au passage une partie des arguments de François Bayrou, déjà en posture difficile. Mais plus profondément, c'est le signe de l'affaiblissement du gouvernement lui-même, et un signe dirigé vers l'UMP, qui ne doit pas se montrer gourmand.
J'ai ce soir le sentiment que Sarkozy va pousser cette Vème République et son régime présidentiel jusqu'aux limites de la démocratie. Sans vouloir le diaboliser, bien sûr.
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