L'analyse de Ségolène Royal était, dès le départ, assez fine, et même consensuelle: les français n'en pouvaient plus d'avoir des leaders sur lesquels ils n'avaient aucune prise démocratique. Le "non" à la Constitution Européenne, les manifestations contre le CPE, les défaites de la droite aux élections régionales et européennes allaient dans ce sens. Le renforcement du pouvoir présidentiel avec le quinquennat et la modification des calendriers électoraux avaient de surcroît achevé la possibilité d'une véritable opposition politique. D'où la (véritablement, à mon avis) bonne idée des différents gestes en faveur de l'écoute, la participation des citoyens, la responsabilité, etc.
Ce qui était véritablement en cause, cependant, c'était le chiraquisme. Surtout: le cynisme politique de Chirac, qui se servait de la hauteur institutionnelle de son mandat pour faire le dos rond en toute circonstance. En profitant ainsi des protections politiques offertes par l'institution, Chirac -- dont le nom était très curieusement absent pendant la campagne, comme si les deux protagonistes craignaient de paraître moins présidentiels que lui -- avait en effet montré les limites de la démocratie sous la Ve République.
Et donc ce qui était une bonne formule pour contrer Jacques Chirac n'a pas été efficace contre Nicolas Sarkozy, qui a réussi à évader toute responsabilité pour sa participation aux gouvernements du dernier quinquenat de Chirac.
Pire, les différentes manifestations de cette analyse ont contribué à affaiblir Ségolène Royal. La souplesse et l'écoute, l'esprit de la négotiation, tout cela a systématiquement désservi la candidate, autant de signes de son incompétence ou de sa faiblesse.
Tant pis pour l'analyse fine, apparamment. Celle de Sarkozy a dû être formulée en quelques secondes : "Les Français veulent du solide. Et y'en a marre des fainéants et des arabes." Malheureusement, c'est d'une efficacité politique redoutable.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire